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Spectacle de la Compagnie Théâtre H (91), vu au Festival d’Avignon, à 10h15, Espace Roseau, jusqu’au 26 juillet
De Jean Claude Grumberg
Interprètes : Valentine Leyser, Guillaume Pannetier
Mise en scène : Clarisse Brunelet
Genre : Théâtre
Public : Tout public à partir de 8 ans
Durée : 55 min
Création 2015
C’est le loup qui raconte, ou plus précisément le Caporal Wolf… Alors qu’il était affecté à la surveillance des parcs, jardins et forêts, il croise le chemin d’une fillette de village insouciante et gaie, vêtue de rouge, qui traverse le bois pour se rendre chez sa grand-mère et lui porter à manger. Très vite il lui demande ses papiers sur lesquels est portée la mention U… Il lui apprend qu’elle est donc UF, et que les UFS n’ont pas le droit de porter du rouge, mais obligation de porter du jaune. Qu’ils n’ont pas le droit de manger ce qu’ils veulent mais seulement ce qui leur est autorisé, pas le droit de travailler, pas le droit d’aller où ils veulent, bref, à peine le droit d’exister, et encore… Il lui assène au passage quelques lieux communs répandus sur les nombreuses tares attribuées aux UFS.
Pour les adultes, au moins au-dessus de la cinquantaine, la tentative d’extermination des juifs par les nazis au cours de la guerre de 39/45 n’est pas une « histoire » inconnue. Mais pour les jeunes de moins de 25 ans, cela semble bien loin, voire « étranger », pour certains même sans fondement. Ainsi pour aider à véhiculer le message, la compagnie Théâtre H a-t-elle choisi de confier les rôles du Chaperon et du caporal Wolf à deux très jeunes comédiens de 18 et 19 ans.
Guillaume Pannetier, très largement servi par son physique, grand, mince, blond, les mâchoires carrées, incarne parfaitement le type « aryen ». Il est à l’aise dans son rôle, s’approprie un accent allemand qui sied pour débiter des phrases hachées (dans le style télégraphique faisant abstraction d’articles et mots inutiles du rôle écrit par Grumberg), ponctuées de « Rapapapapa... Tututtut... Ttssstt... » bien plus inquiétants et évocateurs des penchants du loup que « pas si vite, attention, etc. ». Valentine Leyser paraît moins à l’aise, mais sa jeunesse est aussi le reflet de la fraîcheur et de la naïveté du personnage. Toutefois, le spectacle est encore très récent, c’est son premier rôle, et il faut lui laisser le temps de prendre de l’assurance au fil des représentations.
La mise en scène soignée de Clarisse Brunelet s’appuie sur un décor fait de planches dressées figurant les arbres de la forêt, qui tombent les uns après les autres, jusqu’à ne laisser debout que la porte de la grand-mère devenue clandestine dans ce texte, et celle du marchand de tabac qui l’aide à se cacher. Les éclairages en biais donnent l’effet de la lumière diffuse à travers branches dans les sous-bois, aux heures sombres du soir. Ce côté sombre est accentué par le choix de costumes de teintes foncées avec seulement quelques tâches colorées, le manteau rouge et le châle jaune du chaperon, et le brassard rouge portant un masque de loup stylisé du caporal Wolf… Seuls quelques intermèdes musicaux teintés de musique klezmer apportent douceur ou nostalgie. Heureusement la scène finale voit la rébellion de la fillette, qui veut cesser ce « jeu » et revenir à la vraie histoire du Petit Chaperon Rouge…
La transposition de l’histoire originale à cette période de l’Histoire nécessite pour le jeune public un accompagnement et/ou une préparation en amont. Ce spectacle paraît ainsi tout indiqué pour un public scolaire.
A noter que le spectacle est annoncé pour une durée de 1h10, alors qu’il ne dure pas tout à fait 1h, ce qui est suffisant en termes de concentration pour le jeune public.
Cathy de Toledo