La Mémoire des Serpillières
31 juil. 2015Spectacle de la Compagnie Umbral, Avignon OFF, vu le 21/07/2015
De : Matéi Visniec
Mise en scène : Victor Quesada-Perez assisté de Paul-Antoine Veillon
Interprètes : Lucas Henaff, Laurent Pons, Charles André Lachenal, Aurélie Bozzelie, Doriane Emerit, Mylène Cala, Mélanie Charvy, Aurore Bourgois Demachy, Clémentine Lamothe, Marie Sanson, Sixtine Leroy
Genre : Théâtre
Public : Tout public à partir de 10 ans
Durée : 1h20
C'est la guerre, deux camps, deux barricades de sacs et des guerriers de part et d'autre. Pièce tragi-comique, les combattants armés sont affublés d'un nez rouge de clown.
La compagnie adapte une œuvre encore inédite à ce jour de Visniec écrite en 2012. La mise en scène de Victor Quesada-Perez permet par la présence burlesque des clowns de la compagnie Umbral d'alléger le texte de Visniec. Il y dénonce la décadence du monde surmédiatisé. L'auteur censuré dans son pays est réfugié en France depuis 1987.
Matéi Visniec a vécu dans un monde où oppression et délation mènent à la négation de l'individu. Dans un univers de communication et de libéralisme, la problématique de l'identité se pose, c'est de cette errance moderne que son théâtre nous parle. Le metteur en scène a travaillé avec l'auteur à la réactualisation, à l'uniformisation des nouvelles par l'audience.
Le rat symbolise le cerveau commun. (Un cerveau pour tous tout le monde s'entend.) L'onirique de la pièce, l'omniprésence du rat et, dans cette dernière pièce écrite, Visnièc plus que jamais nous évoque Kafka.
« La Mémoire des Serpillières » évoque un monde envahi progressivement par les rats. Un journaliste de guerre français se trouve être en reportage dans un pays dévasté par un conflit armé. L'absurdité, l'horreur des faits le submergent ; il nous livre ses pensées, son ressenti au fil de ce texte puissant qui ne peut laisser le spectateur indifférent.
Visnièc est journaliste, aujourd'hui rédacteur en chef pour RFI en Roumanie. Dans cette œuvre, il dénonce, une fois de plus avec excellence, l'immoralité, l'inhumanité de nos contemporains.
La mise en scène équilibrée de Victor Quesada-Perez allège la pièce et préserve sa puissance. Omniprésence des guerriers-clowns et, au fond sur une petite scène surélevée, du rat (comédienne au masque du rongeur).
Une adaptation talentueuse pour cette œuvre récente de Visnièc d'une brûlante actualité. A ne pas manquer! Bravo.
Lydie-Gisèle Brogi