Les 7 planches de la ruse
Les 7 planches de la ruse

Spectacle de la Compagnie 111 (31), vu au 104 (Paris 19°), avec le Théâtre de la Ville, le 20/11/2015

Conception : Aurélien Bory

Interprétation : 14 acrobates-chanteurs de l’opéra de Dalian (Chine)

Genre : Cirque

Public : Tout public à partir de 14 ans

Durée : 1h10

Quand Aurélien Bory présente un nouveau spectacle, je me précipite toujours pour le voir. "Les 7 planches de la ruse" ne sont pas, à proprement parler, un spectacle nouveau puisqu'elles ont été créées en 2007. Fidèle au formalisme de l’auteur, cet opus est beau mais décevant. La marque de fabrique d’Aurélien Bory, c’est le dessin de l’espace, la lumière, le jeu de l’acteur-acrobate avec ou contre une structure mouvante. "Les 7 planches de la ruse" n’échappent pas à la règle. La structure – personnage principal de la pièce – qu’il va falloir défier, c’est un tangram géant, vous savez, ce jeu chinois très ancien, constitué de 7 pièces triangulaires que l’on associe à sa guise pour créer de nouvelles formes. Cette structure nous invite naturellement en Chine et c’est à une troupe de 14 acrobates-chanteurs de l’opéra de Dalian qu’il revient de dompter la "machine".

Je suppose donc qu’Aurélien Bory veut nous donner sa vision de la Chine contemporaine. Une société écartelée entre tradition (incarnée par les chanteuses d’opéra, une violoncelliste, et une scène fugace de tai-chi en ombre chinoise) et modernité écrasante (le tangram dessine tantôt des masses urbaines, tantôt des mâchoires dévorantes) ; une société où la foule avance en ordre et se compacte pour déplacer collectivement des montagnes (le tangram) ; une société où l’individu – ici une jeune femme et un jeune homme – semble toujours sur le point d’être écrasé sous le poids d’une machinerie qui le dépasse.

Aurélien Bory est catalogué, à tort ou à raison, comme circassien. En conséquence, il n’y a pas de texte. Que de la musique, trop de musique, une musique qui, hormis l’opéra chinois, génère une certaine angoisse. La lumière, toute en cyclo aux couleurs vives, participe de cette ambiance. Bref, les images sont belles mais on s’ennuie terriblement ! Il n’y a pas de rythme. A chaque nouvelle figure, on se dit : "Tiens, ça va démarrer !" Mais ça ne démarre jamais. On a la fâcheuse impression qu’Aurélien Bory, après avoir joué en solitaire au solitaire et découvert les ressources plastiques et mathématiques du tangram, s’est contenté de le transposer sur scène avec un vague propos. De fait, le spectacle se résume à un déplacement des pièces du tangram ! Et quand on sait l’incroyable potentiel des artistes chinois, il est bien triste de les voir réduits au simple rôle de manipulateurs !

Aurélien Bory reste un maître incontesté de l’espace et de l’image. De ce point de vue, le spectacle est réussi. Mais les belles images ne font pas un spectacle ! Dénuées de jeu, de rythme et de narration claire, "les 7 planches de la ruse" ne convainquent pas.

Catherine Wolff

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