Même pas vrai!

Spectacle de Pierre Delye, vu le samedi 19 novembre 2016, dans le cadre du festival "La maman des poissons" 2016.

 

Conteur: Pierre Delye

 

Genre: Conte

Public: Familial à partir de 6 ans

Durée: 55 min

 

Chronique rédigée par: Isabelle, Didier, Jacqueline et Annie

 

Installée au balcon du théâtre de Pézenas, j’attends d’assister au spectacle "Même pas vrai!". De ma place j’ai une vue plongeante sur la scène, sur laquelle un seul tabouret de bois et de métal attend. Pierre Delye entre en scène. Grand, les yeux ronds, et une voix aux légers accents "du Nord". Sans décor, ni accessoires, le monsieur a suffisamment de talent pour nous emporter dans ses contes par ses intonations, son regard, ses mimiques. Ses contes me semblent être le fruit d’un savant mélange: un soupçon de Perrault, une pointe de La Fontaine, une pincée de légendes… Recette suffisamment savoureuse et présentée avec suffisamment d’énergie pour maintenir mon intérêt malgré ma fatigue et l’heure propice à la dépression post-prandiale. Avec subtilité, il nous amène à réfléchir au sens des mots et des situations, et aborde avec fantaisie des sujets parfois graves tels que l’exclusion ou le rejet. Le livret présentait ce spectacle comme étant familial et abordable dès l’âge de 6 ans, j’émets cependant quelques réserves, 6 ans me paraissant un peu jeune vu certains thèmes et la durée (55 minutes). Ce jugement mis à part, j’ai vraiment apprécié le talent de ce raconteur d’histoires. Isabelle

Il était une fois… un conteur! Ou plutôt, un raconteur d’histoires qui aimait raconter des histoires, précisait-il, et ça tombait plutôt bien. Il s’appelait Pierre Delye et un jour, après maintes péripéties plus rocambolesques les unes que les autres, dont une histoire loufoque à dormir couché, il s’est arrêté à Pézenas pour raconter quelques-unes de ces histoires, aux enfants de la Maman des poissons bien installés dans le bocal baroque du théâtre de Pézenas. Si, je vous assure que c’est vrai, d’ailleurs j’y étais, immergé dans le même bocal que tous les enfants. Les vrais enfants comprenaient beaucoup plus vite que les autres (les adultes et autres chroniqueurs) quand il fallait réagir, comme dans l’histoire du lion et du serpent quand celui-ci dit au lion : ‘’si je te mords… T’ES MORT !’’ criaient en chœur les vrais enfants. En tout cas ce jour-là, à Pézenas, tous les enfants, vrais ou faux, écoutaient les histoires racontées par le grand échalas costaud qu’ils voyaient sur la scène avec une joyeuse attention. Il l’a très bien fait, on voyait bien qu’il connaissait son sujet et le contrôlait avec une quasi perfection. Mais l’enfant non déguisé en moi était en manque de quelque chose: sauf dans la dernière courte histoire, jamais un ou des enfants n’ont eu le rôle principal dans les histoires racontées, comme peuvent l’avoir le Petit Poucet, le Petit Chaperon Rouge ou encore Pinocchio. Oui, ça m’a manqué, et vous savez quoi ? Je suis sûr qu’avec 15 ou 20 ans de plus, quand ce raconteur d’histoires se sera vraiment éloigné de son enfance, il en parlera davantage. Didier

Ce conteur n'a pas besoin d'une mise en scène compliquée: scène nue meublée d'un haut tabouret, lumière discrète - un seul projecteur de couleur neutre. Vêtu d'une chemise et d'un pantalon couleur de muraille, le magicien des mots nous emporte dans de fausses improvisations, soulignées de souples mouvements de mains, sans vraiment insister sur ses hilarants jeux de mots qu'on voudrait tous noter. Pierre Delye est un re-créateur plutôt qu'un créateur. On reconnaît dans les contes de ce jour des thèmes traditionnels de fabulistes, de conteurs et de moralistes: la rencontre avec le diable, une histoire d'animaux exotiques digne de Rudyard Kipling, des histoires entre père et jeune fils où c'est l'enfant qui a raison. On reconnaît dans le premier de ces contes, des influences: une douce loufoquerie évoquant Raymond Devos par ses enchaînements absurdes, et Jacques Prévert par une imagination poétique qui nous emmène en voyage dans un monde onirique peuplé de lapins volants et de culs-de-jatte. La marque personnelle de P. Delye est dans l'usage malicieux de figures de style classiques comme l'anaphore et le zeugma ("j'ai attrapé un pantalon et un rhume") qui produisent un effet comique irrésistible dans un conte pour enfants. Ce bon conteur a eu un bon public: les petits, répondant à l'empathie de ce grand oncle chaleureux et pince-sans-rire, et les grands, appréciant la subtilité du jeu avec les mots et les références littéraires subliminales, l'ont vivement applaudi. Jacqueline

Je ne suis pas seule à entrer dans ce magnifique Théâtre de Molière dont les décors m’enveloppent déjà d'histoires féeriques. Beau brouhaha heureux de rires et de paroles d'enfants comme une plongée dans une mer chaleureuse de nos rives méditerranéennes: je nage de délices! J'avance de découverte en découverte, le regard glissé vers ce paysage de gaieté enfantine. Même pas vrai que je m'ennuie à écouter ce chaotique babillage! Puis l'instant du conteur s'impose, et c'est un géant qui prend la parole dans un éclairage de lumière discrète. Cela laisse la place aux sons et ils en profitent: les mots jonglent de plaisir, rebondissent de vitalité, éclatent de bonheur. De sacrés jeux de mots, soutenus par une multitudes de tons, de mimiques, et d'enthousiasme. Cette tête qui dit non par exemple pendant que les mots choisis disent oui: belle prouesse du corps qui m'emporte dans la joie des rires. Je sens que mon âme d’enfant hisse son regard vers ce conteur au grand pied. Elle palpite au rythme donné par la succession des mises en mots qui soulèvent l'enthousiasme des enfants et je m'y glisse sans toutefois participer aux "t'es mort" scandés de plus en plus fort par ces enfants de plus en plus convaincus. Ce spectacle éveille ma joie. Je sens mes ailes de vie se déployer encourageant le sentiment de résister à l'accélération de nos sociétés, à donner au temps la préciosité de l'instant vrai! Mais oui quel beau plaisir à écouter ces histoires ponctuées de réflexions qui ravivent la profondeur des valeurs de vie pour petits et grands comme on ouvre une fenêtre sur l'horizon des possibles. Ce spectacle est un hymne à la joie de vivre! Annie

 

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