Philo foraine
27 juil. 2017

Spectacle de Monsieur Max (75), vu le 25 juillet 2017, dans le cadre du festival Off d'Avignon, à la Maison IV de chiffre à 12h30.
Auteur et Interprète : Alain Guyard
Genre : Seul en scène
Public : Public adulte
Durée : 1h20
A mi-chemin entre le bonimenteur, les Blues Brothers, le professeur de philo et le Ouech Ouech de cité (oui, je sais, ça fait beaucoup de chemins !), Alain Guyard nous propose une approche de la philo pour le moins originale. Il nous offre les clés d’un raisonnement argumenté, porté par des références à des penseurs divers, et dans un langage imagé et cru. Chaque jour, il nous propose un sujet et c’est un vrai exercice de style dont il se sort à merveille.
Il nous propose son plan, sans formalité et pour donner le ton, tel un bonimenteur de métaphysique ou un décravateur de concept comme il se définit lui-même :
la thèse : où il présente la pensée des autres,
l’antithèse : où il présente une approche contradictoire et critique de la pensée des autres,
et la 3ème partie : la foutaise.
Autant dire, que le personnage ne se complaît pas dans une image de philosophe drapé dans ses pensées. Il nous rend le concept accessible et intelligible.
Notre sujet du mardi devait être "Faut-il faire le bien ou se faire du bien ?". Ce jour-là, il a choisi un autre sujet : "Pourquoi il vaut mieux avoir les bourses en action plutôt que les actions en bourse". Le bonhomme aime la provocation et aime réfléchir mais aussi rire de tout ! La démonstration repose sur la volonté de mettre en pièces les idées reçues, comme celles qui consistent à penser que la bourse, c’est l’économie et c’est du concret ! Il s’appuie, entres autres, sur les pensées de Blaise Pascal et Hobbes, penseurs du 17ème siècle, qui reposent toutes deux sur le constat que l’homme est mauvais et qu’il faut le garder sous surveillance. Pour l’un, une surveillance religieuse, pour l’autre, une surveillance étatique. Ces deux pensées sont confortées par Adam Smith, qui pour s’émanciper de la religion et de l’État, développe le concept de marché et de libre-échange, arbitré par la main invisible du marché, censée réguler miraculeusement tout le bazar ! On a bien vu depuis comme ça marche !
Dans sa seconde partie, il évoque les notions du don/contre-don, reposant sur des valeurs d’échanges subtiles et équilibrées (savoir donner, savoir recevoir, savoir rendre), en faisant référence à Marcel Mauss (1925) qui a développé le concept des coopératives agricoles, et en s’appuyant sur le tube de Jea- Jacques Goldmann, "Je te donne". Comme quoi l’homme a l’esprit large.
Enfin, pour retomber sur ses pattes, il termine sa démonstration par le don ultime, le don de la vie, celui qui ne peut pas être du "donnant-donnant". Pour donner la vie, pour faire un enfant, pour être dans cette notion du don, à l’opposé du marché, il faut bien avoir les bourses en actions. CQFD.
On peut ne pas adhérer à la démonstration comme nous le rappelle Alain Guyard, mais celle-ci a le mérite de nous faire rire, de parler de concepts importants et de voir comment combattre les idées reçues.
Une belle réussite !
Eric Jalabert