Ils ne mouraient plus... mais étaient-ils encore vivants ?
01 juil. 2019Présent sur le Off d'Avignon 2019
Spectacle de la compagnie Théâtre Organic (93), vu le 19 juillet 2018 au théâtre des Lucioles à 18h50, dans le cadre du festival d’Avignon Off 2018.
Auteurs : Daniel Dalmaroni & Sophie Gazel
Mise en scène : Sophie Gazel
Interprètes : P. Contestabile, M.V. Monedero, C. Lucero, D. Dall’Agnola, T. Reyes
Genre : Théâtre
Public : tout public à partir de 10 ans
Durée : 1h15
La trame est simple : trois frères et sœurs ont placé leur mère, qui perd la tête, en maison de retraite. On lui donnait six mois à vivre. Dix ans après, dans l’impossibilité de régler les mensualités extravagantes de ce type d’établissement, ils envisagent de la tuer. Qui va s'y coller ?
Le thème de la vieillesse et du sort réservé à nos anciens est un sujet d’actualité qui me parle particulièrement (je vous ai déjà parlé de ma mère ?). C’est pourquoi, ce spectacle avait retenu mon attention. Bien m’en a pris.
Le traitement proposé par le Théâtre Organic, compagnie franco-argentine, est de haut vol. J’aime cet humour noir et féroce sur des sujets d’une réalité pourtant peu reluisante, dont les Argentins sont friands. Ils nous offrent un grand moment de théâtre avec cette fratrie cynique et pourtant si humaine.
Les comédiens sont tous remarquables dans leurs personnages d’affreux, sales et méchants. Ernesto, calculateur et froid, Mario, gentil et influençable, et Ana, perdue et un peu niaise, forment une famille à failles finalement très réaliste, même si le trait est forcément un peu marqué ; c’est du théâtre. C’est donc déjà un grand bonheur de les voir évoluer entre eux, et d'échanger de façon froide et pragmatique sur un sujet aussi tabou. C'est drôle, mordant, et ça balance pas mal sur la réalité de cette situation à laquelle chacun d'entre nous risque d'être confronté un jour ou l'autre (la maison de retraite, pas le matricide).
Mais la scénographie, s’appuyant sur deux espaces scéniques, est particulièrement remarquable et rend l'ensemble jubilatoire. C’est ingénieux, bourré d’idées et très efficace. Elle permet, notamment dans la fenêtre d’arrière-plan, d’évoquer des moments passés, des pensées fulgurantes ou des cauchemars meurtriers qui apportent à cette comédie dramatique, ce caractère onirique propre à nos amis Argentins. Le travail avec une circassienne complète un dispositif dont je vous garde la surprise.
C’est drôle et provocant, juste et intelligent, sensible et surprenant. Vous l’aurez compris, j’ai adoré. Courrez-y !
Eric Jalabert