Le Petit Chaperon Louche Ou le Mystère des Oiseaux Loups
30 juil. 2018Cie Premier Acte (69)
Vu le 17 juillet, AVIGNON OFF 2018, La Luna 11h20.
Texte et mise en scène : Sarkis Tcheumlekdjian
Jeu : Serge Ayala, Mégane Cottin, Claude Leprêtre
Composition musicale : Gilbert Gandil
Costumes : Manon Tauszig
Masques : Marie Muyard
Lumières : Jérôme Allaire
Univers sonore : Éric Dupré
Vidéo : Catherine Demeure
Théâtre tout public à partir de 8 ans
Durée 55 minutes
Dès le début du spectacle, le spectateur se retrouve plongé dans l’ambiance, au cœur d’une sombre forêt, le ciel nuageux en arrière-plan annonce le soir, on entend le bruissement des branches, des aboiements de chien dans le lointain, le ululement des chouettes, le cri-cri des grillons. Et une petite musique douce…
Un jeune homme, un vagabond peut-être, habillé de haillons, coiffé d’une casquette à la Gavroche, assis sur une valise, semble attendre, ou se reposer. Est-il perdu ?
La charmante Charlotte, jeune demoiselle habillée de rouge et blanc, avec un petit sac rouge, coiffée d’un petit chapeau rouge, traverse la forêt pour aller rendre visite à sa grand-mère souffrante et lui apporter quelques douceurs…
Elle n’est pas effrayée par cette rencontre imprévue, ni par la gouaille du jeune homme un peu crâneur. Elle semble plutôt curieuse. Le jeune Loupchik, bien que méfiant, ne ressent pas le besoin d’être agressif. Il sent au contraire naître en lui un sentiment inconnu…
Une relation de confiance s’établit entre les deux jeunes gens, même si Loupchik refusera de dire ce que contient sa valise, et que l’on ne découvrira qu’à la fin du spectacle. Loupchik apprend à Charlotte qu’il a dû quitter le Pays des Loups devenu inhospitalier, que sa mère a été tuée, que son père est en prison, parce qu’il a volé un œuf à une vieille femme, pour nourrir son fils. Lui aussi, il fait parfois des bêtises, mais c’est parce qu’il a faim, et pour faire un peu le malin ! Mais il est seul, fatigué, désabusé, et par-dessus le marché, poursuivi par un chasseur...
Charlotte décide d’aider son nouvel ami. Et pour détourner l’attention du chasseur, ils vont prendre des chemins différents et se retrouveront devant la maison de la grand-mère à qui Charlotte demandera de protéger Loupchik, qui est un gentil loup isolé.
Certes, la grand-mère craint les méchants loups qui ont mauvaise réputation. Mais elle n’est pas commode et surtout bien décidée à défendre sa collection d’œufs, qu’un vieux loup a déjà tenté de lui voler. Elle n’hésite pas à faire appel au chasseur pour la débarrasser du loup… L’histoire se terminera finalement bien mieux que dans le conte traditionnel, sur des notes positives d’espoir, même si ce n’est pas le « happy end » qu’on avait espéré…
La mise en scène de Sarkis Tcheumlekdjian rassemble tous les ingrédients pour nous offrir un spectacle complet. L’ambiance est parfaitement créée, le décor épuré est sublimé par des éclairages précis, l’action est accompagnée d’une bande-son évocatrice. Les costumes sont extrêmement soignés, les très beaux masques, qui couvrent à moitié le visage des acteurs, confèrent une certaine étrangeté aux visages qui semblent en partie « figés », mais dont les yeux sont très mobiles. Peut-être était-ce pour accentuer l’idée qu’aucun personnage n’est au fond celui qu’il semble être au premier abord… ?
Les acteurs alternent jeu et narration, et livrent tous d’excellentes prestations, avec une mention spéciale pour Serge Alaya en grand-mère vindicative et chasseur compréhensif. Le rythme est relativement lent, mais il fallait probablement donner aux protagonistes le temps de s’apprivoiser, de faire plus ample connaissance, pour passer outre des apparences trompeuses, et enfin s’apprécier, voire s’aimer…
Un magnifique spectacle qui a séduit un public nombreux mais étrangement composé essentiellement d’adultes. Peut-être la présentation faite dans le catalogue du Festival Off n’en donnait-elle pas une idée claire, ce qui aura effrayé certains parents.
Pour ma part, je n’ai pas trouvé la proposition misérabiliste, ni même aussi orientée que je l’avais craint vers la problématique actuelle des migrants, même si cette lecture existe en filigrane… Ce qui dans tous les cas, n’enlève rien à la beauté du spectacle !
Cathy de Toledo