Marx, FTM, Fétiche Ta Marchandise
01 juil. 2019Présent sur le festival 2019
Cie du Visage/Cabo Mundo (34)
Spectacle vu le 16 juillet, AVIGNON OFF 2018, Théâtre Carreterie, 15h45.
De : Benjamin Perez et Avner C. Pérez
Interprètes : Benjamin Pérez et Raphaël Plutino
Genre : Théâtre musical
Public : Tout public
Durée : 1 h
Dès l’installation des spectateurs, deux bonimenteurs en redingote et chapeau haut de forme, débitent un flot d’arguments vantant les mérites d’un robot interstellaire miracle caché sous un tissu, et qui ne sera d’ailleurs pas dévoilé.
Cette première saynète sera suivie de plusieurs autres, non dénuées d’humour mais confinant parfois à l’absurde, donnant à voir des personnages engagés dans des situations d’achat/vente de produits très variés.
Le plateau est dépourvu de décor, mais une création lumière précise restitue l’ambiance propre à chaque situation. Peu d’accessoires également, dont un portemanteau qui supporte quelques pièces vestimentaires nécessaires à la transformation des comédiens en chaque personnage.
Les différentes séquences proposent une interrogation autour de la pensée de K. Marx, qui développe, dans le Livre 1 de son célèbre « Capital », la notion de fétichisme des marchandises, et les concepts de valeur d’usage et valeur d’échange, composantes de ce qu’il nomme « la nature bifide de la marchandise ». Il dénonce ainsi cette sorte d’illusion qui fait que l’on attribue aux marchandises des qualités bien supérieures à ce qu’elles sont réellement, la fétichisation de l’objet dans la société capitaliste, le réduisant alors à sa seule valeur d’échange.
Ainsi, pour dénoncer cette absurdité et surfer sur les valeurs des objets définies ci-dessus, on croise dans les différentes saynètes, un amateur d’art russe à qui on propose un buste de K. Marx, un marabout autant réparateur de téléphones que d’âmes égarées, et bien d’autres personnages… Jusqu’à aboutir à la situation extrême de « chosification » de l’individu mettant un scène un objet/femme marchandise (excellente composition de péripatéticienne de Raphaëi Plutino !) dans un échange verbal totalement décalé avec un client potentiel…
Ce texte étrange et exigeant est heureusement porté par d’excellents comédiens et une mise en scène millimétrée. Au cœur de ces notions hautement philosophiques, les auteurs ont osé introduire des intermèdes musicaux de rap et de slam, assortis de compositions musicales originales et chorégraphiées, qui apportent des « respirations » certes incongrues mais ô combien salutaires !
C’est un spectacle qui, à mon sens, ne s’adresse pas vraiment au spectateur lambda, qui demande une certaine concentration, et peut-être même un minimum d’information préalable.
Pour ma part, je trouverais intéressant d’assister à l’occasion à une nouvelle représentation, qui me permettrait, puisque j’ai désormais étudié le sujet de plus près, de mieux apprécier la portée du spectacle.
Cathy de Toledo