Wee Too Quartet
29 oct. 2018
Concert performance, vu le 5 octobre 2018 à 20h30 à l’AJMI (Avignon, 84), présenté à l’AJMI et à la Cité de la Musique à Marseille suite à une résidence de création de 4 jours, dans le cadre des séries « Just Listen ».
Avec :
Musiciens :
Luc Bouquet à la batterie : attentif et conscient,
Bernard Santacruz à la contrebasse : dans une écoute perpétuelle,
Simon Sieger au clavier Fender Rhodes : totalement présent,
Sabir Mateen au saxophone : profond et inspiré.
Danseurs :
Geneviève Sorin : un calme expressif et souffrant,
Katherine Josephau : la vie envers et contre tout,
Sherwood Chen : une intériorité puissante et manifeste.
Arts Visuels :
Sylvia Eustache Rools : gracieuse, au silence assourdissant.
Genre : Free Jazz + Guests (arts visuels, danse)
Public : Public averti
Durée : 1h05
En regardant ce spectacle, j'ai ressenti tout ce qui n'y est pas dit et que l'on peut se raconter sans faille. Oui du premier au dernier geste, de la première à la dernière note tout se crée dans l'imprévisible et la cohérence.
Sylvia sort des os d'un sac, apparente incongruité. Mais quand elle en fait glisser un autour de chaque danseur, cela me provoque un sentiment profond et terrible. « Ils dansent avec la mort » me dis-je ; lieu commun que je chasse, aussitôt remplacé par la force des ossements. Et un sens apparaît : Sylvia, douceur occultée, et les os, horreur envahissante, représentent le monde intérieur des êtres dont les mouvements révéleront les lourds traumatismes.
La douleur se vit dans une momentanée perte de raison. Depuis l’immobilité jusqu’à un apaisement qui n'est pas encore une résilience.
Entre temps, c'est un combat. Les trois danseurs, selon leur nature, s'accrochent. D'abord sans repères, leurs gestes vifs, saccadés, figurent des troubles psychiatriques. Mais la vie n'abdique pas et les voilà mimant maladroitement des gestes du quotidien. Katherine et Geneviève s'y acharnent tandis que Sherwood reste impassible et combattant.
Puis les corps tentent de se soutenir, de se reconnaître mais en ont perdu l'expérience.
Jamais ils n'abandonnent. Et Geneviève déploie alors un long tissu blanc, signe d'apaisement. Les danseurs évoluent autour, mais pas dessus comme si cet espace était sacré... ou tabou.
Ils sont prêts de nouveau à s'écouter. Et Sylvia se remanifeste. Bienveillance et sourire lumineux pour chacun, qui se termine par une étreinte douce pour Sherwood. Une paix nouvelle semble promise, un jour...
Ce spectacle m'a attrapée dès le début. Sur scène, quatre musiciens talentueux, partie prenante d'une histoire informulée. Quand Katherine s'élance et tourne frénétiquement, Luc la suit jusqu’où elle voudra aller.
Musique riche, inventive, accordée aux corps jusqu'au dernier solo de Sabir qui me laisse encore un moment auprès de ces belles personnes.
Valérie Lorenzo