Bérénice
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Un spectacle produit par le TGP (93 Saint-Denis) vu le 27 janvier 2019 au TGP  (93 Saint-Denis)

Mise en scène : Isabelle Lafon

Comédiens et musiciens : Karyll Elgrichi, Pierre-Félix Gravière, Johanna Korthals Altes, Isabelle Lafon, Judith Périllat

Genre : théâtre

Public : adulte

Durée : 1H15.

Ma cadette adore Racine et je suis sommée de réserver dès que j’en repère un dans les salles que j’ai coutume de fréquenter. C’est ainsi que je suis allée voir « Bérénice » mise en scène par Isabelle Lafon au TGP. La salle n’était pas pleine mais plus jeune que d’habitude et offrait une diversité appréciable et pas seulement parmi les scolaires. Le comble de ma petite histoire, c’est que ma cadette a du honorer une invitation de ses grands-parents à l’opéra. Tant pis pour elle !

C’est une « Bérénice » très resserrée à laquelle on assiste. Le texte, émondé, est recentré sur le dilemme cornélien et les passions qu’il suscite. Le plateau est vide, à l’exception d’une table de travail en avant scène, côté jardin. Les sept personnages de la pièce de Racine sont interprétés par 5 comédiens, 4 femmes et un homme. Place donc au jeu (sonorisé) et à la mise en scène, forte de quelques très jolies trouvailles.

Le spectacle débute comme si l’on assistait au travail préparatoire d’une représentation. Les comédiens travaillent à la table. C’est en fait l’occasion de résumer l’intrigue. Ce qui est très habile c’est que Pierre-Félix Gravière glisse dans le langage contemporain des répliques entières extraites de la pièce comme pour mieux illustrer un moment clef. Subrepticement, on en arrive au monologue d’Antiochus et le verbe de Racine se donne désormais à entendre intégralement.

La deuxième trouvaille concerne Bérénice. Elle est incarnée par Johanna Korthals Altes déjà vue dans « Let me try V.Wolf » mise en scène par la même Isabelle Lafon…. et déjà par moi détestée. Qu’importe, elle a ici l’âge de son héroïne. Mais quand Bérénice apprend sa répudiation, la comédienne qui se tenait dans l’ombre depuis le début du spectacle et qui n’est autre qu’Isabelle Lafon elle-même, prend le relai. C’est une Bérénice subitement fanée par l’épreuve qui continue le rôle. A moins qu’ayant, en dépit de toute prédiction, atteint l’âge mûre, elle s’amuse à se jouer, à rejouer cette tragédie à laquelle elle avait cru devoir succomber.

La troisième trouvaille réside dans la distribution. Outre ce qui précède, Titus est incarné par l’extraordinaire Karyll Elgrichi, maintes fois vue chez Bellorini. Servie par sa voix d’alto, elle campe un personnage impérial mais intérieurement passionné. Les trois confidents –Arsace, Phénice et Paulin- sont joués par Judith Périllat qui a le don incroyable d’individualiser parfaitement chacun de ses rôles, qu’il soit masculin ou féminin.

« Bérénice » d’Isabelle Lafon est une belle initiation à l’univers de Racine ; initiation dans le sens où, de mon point de vue, le spectacle est peu expéditif. Hormis mon rejet épidermique de la comédienne qui incarne le rôle titre, la prestation des comédiens est époustouflante.

Catherine Wolff

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