La Nuit juste avant les forêts
13 juil. 2019Spectacle de la compagnie « Bordcadre » (62) vu le vendredi 12 juillet à 22H00 au Théâtre Le Petit Louvre dans le cadre du Festival Avignon OFF 2019. Du 5 au 28 Juillet 2019- Relâches les 10,17 et 24.
Texte : Bernard-Marie Koltès
Mise en scène : Cécile Rist
Comédiens : Guillaume Tobo , Bastien d’Asnières
Genre : Théâtre
Public : adulte
Durée : 1H20
Venir au Festival d’Avignon sans pouvoir assister à une pièce de Koltès, cela m’est inenvisageable ! Ca tombe bien, il y 3 adaptations de cet auteur cette année. Je privilégie «La Nuit juste avant les forêts». J’ai le souvenir d’avoir déjà vu 2 adaptations de ce texte, dont une avec Denis Lavant. «Jamais 2 sans 3», n’est-ce pas ? Et j’ai vraiment bien fait.
Dès le début de la pièce, le spectateur est happé par le contraste entre la nudité du plateau et la fulgurance du comédien, Guillaume Tobo qui envahit le plateau dès le 1er mot (Le texte est un très long monologue de 63 pages !). Puis la parole devient très vite logorrhée. Ce n’est pas un texte simple pour un acteur ! Ici, pas de failles dans la transmission ni dans la réception. En tout cas pour moi….
Mais qui est cet homme qui hurle sa rage humide et désespérée. Un SDF, un «gilet jaune», un migrant, un paumé ? Est-il dérangé, malade, alcoolisé, psychologiquement à bout ? On comprend juste que c’est un étranger. Cette violence, il ne peut pas la garder au fond de lui. Il faut qu’il la partage avec quelqu’un. Alors il se trouve «un amant» anonyme qui, dans le choix de la mise en scène de Cécile Rist, sera un spectateur désigné au hasard, un jeune homme. Audacieux. A d’autres moments, le comédien arpentera aussi la salle parce que cet étranger c’est peut-être juste nous et que nous devons entendre cette rage qui est la nôtre, à divers degrés...Alors, il est tout proche.
L’«Autre» anonyme, occupera le fond du plateau de longues minutes, assis, spectateur muet privilégié de cet acteur exceptionnel.
Qui regarde l’autre au juste ? Qui est acteur ? Qui joue ? Qui est assis ? Qui est debout ? A cet «Autre», on peut tout dire précisément parce qu’on ne le connaît pas. On peut le kidnapper, surtout quand on n’a plus rien à perdre.
Dans la pièce, il n’y a pas de forêt, il n’y a pas de cité. Il y a la nudité d’un lieu improbable et sans doute universel que le comédien remplit avec maestria. Et puis quand les quelques notes de musique interprétées par Bastien d’Asnières surgissent, le spectateur est à son « comble théâtral ».
En tout cas, ce fut le cas pour moi ce soir-là.