Albatros
Albatros

Spectacle du collectif « Or Normes » (86),  vu au Théâtre de Nîmes le 15 avril 2021. Présentation réservée aux professionnels

 

Texte : Fabrice Melquiot

Mise en scène : Christelle Derré

Comédiens : Bertrand Farge/Eric Bergeonneau, Stéphane Godefroy, Camille Leriche, Anatole Decouvoux Du Buysson, des pigeons.

Genre : Théâtre tout public

Public : tout public à partir de 9 ans

Durée : 1H20

 

 

Je me sens à nouveau privilégiée d’entrer dans un théâtre et de quitter mon quotidien pour me laisser entraîner dans l’univers qui va m’être proposé. C’est le matin, la salle est presque vide puisque seuls les professionnels sont invités, mais dès le lever de rideau, je plonge !

 

 

Le décor est magique : des écrans rigides et transparents, sur plusieurs niveaux,  vont permettre tout au long du spectacle de projeter les univers graphiques des différentes scènes : immeubles, affiches publicitaires comme dans nos villes,  intérieurs des maisons, jardins, étangs, animaux….

L’univers sonore est aussi très présent et accompagnera les protagonistes, le récit et les émotions que nous allons vivre.

Tite Pièce et Casper, les deux héros d’Albatros, sont deux enfants de la rue. Ils ne se sentent bien ni dans leur famille, ni à l’école. Alors assis sur les trois marches d’un immeuble, ils observent les voitures noires et parient sur les costumes noirs qui en sortent : gangster, star ou homme politique ?

Puis l’histoire se construit autour des rencontres que vont faire les deux protagonistes. Notamment Casper qui va faire surgir le « Génie de l’huile de coude », génie de fin du monde puisqu’annonciateur d’un déluge et qui va intimer à Casper de sauver sur une barque sept personnes, pas une de plus.

Casper doit donc trouver sept grands hommes qui pourront perpétuer l’espèce, mais alors qui : des basketteurs ? Des scientifiques ? Ou bien son père et la mère de Tite Pièce qu’ils aiment malgré la violence qu’ils leur infligent ?

Et si tout le monde méritait d’être sauvé, parce qu’on est tous un jour quelqu’un de bien ? N’est-il pas finalement impossible de choisir ?

L’écriture  est finement ciselée, chaque phrase est une réplique que l’on voudrait retenir pour sa profondeur, sa justesse ou sa drôlerie.

L’univers surréaliste apporté par la dilatation des espaces et du temps, par les irruptions de personnages et de situations burlesques et cartoonesques très réussies, ne laisse aucun moment de vide au spectateur.

Les personnages sont attachants, émouvants avec  leurs faiblesses… et leurs forces qui se révéleront au gré des rencontres.

Pour moi, le tour de force se trouve dans d’intenses moments où le rire se mêle aux larmes. Texte, mise en scène, décors, costumes, musique se renforcent mutuellement pour amener ce bouillonnement d’émotions que je viens chercher au théâtre.

Les thèmes abordés sont forts : la violence des parents, la mort, la solitude, l’abandon, la misère, l’alcool, la futilité de la vie…

Bien sûr l’espoir est présent et le traitement burlesque aide à supporter.

Mais au bout du compte Tite Pièce se retrouve seule et ses larmes nous emportent, la violence faite aux enfants n’est pas édulcorée. La souffrance de Tite Pièce nous arrive en pleine face notamment par sa propension à se frapper la tête quand elle est triste et cela arrive plus d’une fois.

Je me suis donc questionnée sur l’âge minimum annoncé. L’auteur et la metteuse en scène font bien sûr le pari de l’intelligence des enfants, sur leur capacité à se questionner, à chercher des réponses et à  trouver les ressources en eux-mêmes pour y répondre, mais ce spectacle doit être accompagné par les adultes. Ils doivent se sentir prêts à répondre aux questions qui ne manqueront pas à la sortie de la salle par un échange avec les acteurs/metteuse en scène, les enseignants ou simplement parents/enfants.

Le collectif propose aussi de nombreux ateliers en amont.

Il ne faut pas hésiter à les contacter pour en parler avec eux, le spectacle a déjà été joué plusieurs fois et le retour d’expérience est donc intéressant avant de programmer.

 

Marie-Pierre HUSSON

 

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