La mouche
16 sept. 2021
Un spectacle produit par le Théâtre des Bouffes du Nord et la Compagnie Point Fixe (75) et vu au Théâtre des Bouffes du Nord le 14 septembre 2021.
Texte : librement inspiré de George Langelaan
Mise en scène : Valérie Lesort et Christian Hecq
Comédiens : Christian Hecq (sociétaire de la Comédie-Française), Valérie Lesort, Christine Murillo, Jan Hammenecker
Scénographie : Audrey Vuong
Plasticiennes : Carole Allemand et Valérie Lesort
Genre : théâtre
Public : adulte
Durée : 1H30
Il semblerait enfin que ce soit pour de bon ; la reprise des spectacles. Et pour compenser sans doute ces deux années de presque abstinence, la saison démarre beaucoup plus tôt qu’à l’accoutumé. Et c’est tant mieux. En guise d’inauguration, j’ai choisi d’aller voir « la Mouche » ; moins attirée par l’histoire imaginée par George Langelaan que j’ignorais (il en existe pourtant deux versions cinématographiques dont l’une de Cronenberg) que par la présence de Christine Murillo, à priori gage de qualité. Je suis sortie mitigée
-« La mouche » met en scène, dans les années 60, une maman en âge d’être grand-mère et qui vit avec son grand dadet de fils, Robert, qu’elle aimerait enfin caser. Le problème, c’est que Robert, la cinquantaine, n’a guère d’autre passion dans la vie que de mettre au point une machine à téléporter, Par son mode de vie, ce duo atypique et le ton comique évoquent souvent les Deschiens dont le chien qui évolue sur scène est une allusion directe. Mais suite aux aléas de la machine à téléporter, cet univers de petites gens bascule soudainement dans le fantastique, sorte anti-version de la « Métamorphose » de Kafka.
Le décor rend admirablement compte du déterminisme social : en avant scène, une pelouse dégarnie et un parterre qui ne l’est pas moins malgré son inévitable nain de jardin. En fond de scène, un rideau de fer qui, une fois levé, laisse apparaître le laboratoire de Robert avec force consoles et habitacles. Le garage prend appui sur un mur aveugle traversé par des gouttières. A cour, une caravane, des attrape-mouches en tout genre, un clapier, une télé. L’ensemble est bien exploité et participe largement à la tonalité décalée des protagonistes.
Quelques scènes soulignent avec bonheur ce drôle de monde : la saignée du lapin, les aventures du chien Charlie qui par la grâce de la machine de Robert devient Laïka avant de finir en charpie, la métamorphose de Robert en mouche et sa déambulation sur le mur aveugle.
Mention spéciale donc aux plasticiennes et à la scénographe. Mais le jeu est inégal, desservi par un texte un peu bancal. Il est dommage, à mon sens, qu’il faille attendre les dernières minutes pour en venir à la métamorphose de Robert. Ce déséquilibre dans la construction provoque un manque cruel de rythme et des longueurs au risque de l’ennui.
« La mouche » est un spectacle populaire et divertissant, riche en belles trouvailles visuelles. Mais la focalisation sur le phénomène social plus que sur le phénomène fantastique m’a parfois laissée planer ans le vide.
Catherine Wolff