DÉRAISONNABLE
03 juil. 2022Le métier des comédiens est un exutoire par où s'épanchent leur déraison
Un spectacle produit par la compagnie Les Productions du Sillon (75) et vu au Théâtre l’Artéphile le 14 juin 2022 dans le cadre des avant-premières du Festival Off à Avignon.
Texte : Denis LACHAUD
Mise en scène : Catherine SCHAUB
Assistante à la mise en scène : Agnès HAREL
Interprétation : Florence CABARET
Création lumières : Thierry MORIN
Univers sonore : Aldo GILBERT
Genre : Seule en scène
Public : tout public à partir de 12 ans
Durée : 1H15
À voir ou revoir au Théâtre L’Artéphile, 5 bis-7, Rue du Boug Neuf 84000 Avignon (+33) 4 90 03 01 90), du 07 au 26 juillet à 13h30 ; relâches les mercredis.
Il y a des auteurs que l’on suivrait les yeux fermés, c’est mon cas avec les écrits de Denis Lachaud. Après « Mon mal en patience » et « La Magie lente » entre autres, on le retrouve pour « Déraisonnable » où il nous offre ce qu’il sait si bien faire : un texte acide où il décortique les méandres de l’esprit humain et pointe du doigt ceux qui condamnent sans savoir les gens qu’ils disent différents.
Je vous annonce un seule en scène, pourtant la comédienne n’est pas tout-à-fait seule. Elle est plusieurs, elle est multiple, car elle est bipolaire. Et monter sur scène pour interpréter des personnages alors que soi-même on est habitée par une hystérique et une dépressive chronique, ça peut devenir très compliqué voire même insurmontable, surtout quand le diagnostic tombe tard, très tard, trop tard. Florence en a fait les frais, et elle vient nous raconter comment elle a réussi à apprivoiser ses autres après de nombreuses mésaventures qui pourraient être drôles si elles n’étaient pas si dramatiques pour la comédienne : elle en perd son travail, elle en perd sa santé physique et mentale. La mise en scène volontairement minimaliste (une chaise dans un décor blanc) rajoute à la place prise par le personnage principal : La maladie.
Florence Cabaret est magistrale dans cette interprétation ou elle passe du rire aux larmes, de l’état dépressif à la colère en un quart de seconde, surprenant un spectateur qui passe lui-même du rire à la culpabilité d’avoir ri, lui rendant un peu plus familiers et compréhensibles les effets dévastateurs de la bipolarité.
Et n’est-ce pas le but du spectacle de réveiller les esprits des spectateurs ? En cela, le pari est totalement réussi.
Myriam Chazalon