Catalogue Off 2022

Catalogue Off 2022

M.O.L.I.E.R.E.

Spectacle de la Compagnie Grand TIGRE (36 et 93), vu le 21 juillet à 14h25 au Théâtre des Barriques, dans le cadre du festival Avignon off, du 7 au 30. Sauf mardis.

 

D’après la vie et l’œuvre de Molière

Conception : Clément Beauvoir, Lucas Hénaff, Etienne Luneau

Mise en scène : Elsa Robinne

Avec : Clément Beauvoir, Lucas Hénaff, Etienne Luneau, Joseph Robinne

Genre : Théâtre

Public : à partir de 10 ans

Durée : 1h15

 

La compagnie Grand TIGRE, entendez par là « Triptyque pour l’Inspection Générale du Répertoire Essentiel », propose avec ce spectacle M.O.L.I.E.R.E., sous-titré « Méli-Mélo Oratoire Librement Inspiré d’Errances dans le Répertoire de l’Eponyme », le premier volet d’un triptyque, qui sera suivi d’un T C H E K H O V et puis d’un S H A K E S P E A R E, acronymes du même acabit. Je me trompe peut-être, mais il semble que certains ont pas mal brainstormé pendant le confinement !  L’idée étant de ne pas se contenter d’une œuvre de l’auteur, mais « d’enfourcher toute l’œuvre » comme ils disent, pour traverser la vie de l’auteur. En route donc !

 

Molière, né Jean Baptiste Poquelin, était destiné à prendre la succession de son père tapissier. Mais ce n’était pas dans ses projets. Il se fâche donc avec son père, et à 21 ans, iI fonde avec quelques amis (dont les Béjart) la troupe l’Illustre Théâtre, avec un répertoire de pièces tragiques.  Il rencontre LE tragédien de l’époque Montfleury, qu’il voudrait bien égaler ! Il prend comme nom de scène Molière, « à cause des pierres à meules », comme se plaît à le répéter tout au long du spectacle Etienne Luneau, qui incarne Molière, seul rôle qu’il porte dans la pièce.

Mais la tragédie ne lui réussit pas. Le succès n’est pas au rendez-vous, et la troupe part sillonner les routes du sud de la France. C’est à Pézenas qu’il rencontre le prince de Conti, son premier soutien. Après des années d’itinérance, la troupe finit par regagner Paris, où Molière obtiendra le soutien du Roi, et deviendra célèbre.

Le but de la Compagnie n’est donc pas seulement de « raconter » la vie de Molière. Il est aussi question d’évoquer l’œuvre, tout en suivant le parcours de l’homme, au fil des rencontres et de son évolution personnelle, après qu’il eut compris que son avenir était plutôt dans la comédie, même s’il n’a eu de cesse de s’essayer à la tragédie à plusieurs reprises …  Inénarrable scène où Etienne Luneau se déshabille (pas totalement quand même !) pour s’étendre au sol et jouer une mort tragique, bien que ses compagnons de troupe essayent de l’en empêcher… Et il va nous la refaire en plus !

Les 3 comédiens au plateau, accompagnés par un musicien live aux claviers, ont choisi d’émailler leur récit de répliques et de scènes (en citant le plus souvent l’œuvre, l’acte et la scène, ce qui accentue le comique) puisées dans le répertoire de Molière, petites bulles qui éclatent à la surface sans qu’on s’y attende ! On retrouve des extraits de l’Avare, Le médecin malgré lui, Dom Juan, Le bourgeois gentilhomme, Les fourberies de Scapin, et bien d’autres….

Pas question de costumes, ni même de décor, sinon trois chaises, un tapis…  Les deux comédiens qui incarnent tous les personnages réels (que croise Molière), ou inventés (tout droit sortis de son œuvre, bien que les premiers aient bien souvent inspirés les seconds !), utilisent quelques accessoires vestimentaires, mais surtout le jeu burlesque et le mime, comme pour le prince de Conti, qui arrive sur son fier destrier (qui n’en finit plus de claquer des sabots), ou proposent des interprétations aussi inattendues que savoureuses, tel Lully en crooner.

Un tel spectacle, fruit d’une écriture collective, à la table comme à la scène, propose une approche dynamique et facétieuse d’un auteur, qui, s’agissant du fougueux Molière, aurait probablement apprécié cette proposition. C’est irrévérencieux parfois, cabotin, mais c’est moderne, très intelligent et instructif. Les comédiens s’en donnent à cœur joie, s’affranchissent parfois de la vérité historique, ou en tous cas ne manquent pas d’y mettre leur grain de sel, se laissent aller probablement à quelques digressions, voire quelques improvisations (m’a-t-il semblé ?) Ils s’amusent manifestement beaucoup, et nous aussi !

                                                                                             

Cathy de Toledo

Retour à l'accueil