Photo Julie Mitchel - Site compagnie

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Eurydice aux enfers

Spectacle de la compagnie de l’eau qui dort (92) vu au Théâtre Arto le 30 juillet à 19h35 dans le cadre du festival Off d’Avignon. Jusqu’au 30 juillet.

 

Auteure et mise en scène: Gwendoline Destremau

Interprètes: Tom Bérenger, Emilie Bouyssou, Arthur Dupuy, Pierre-Louis Gastinel, Louise Herrero

Lumières : Bertille Friderich

Costumes : Maxence Rapetti-Mauss

Genre : Théâtre contemporain

Public : à partir de 10 ans

Durée : 1h

 

Dernier spectacle du Off pour moi et je me suis laissé tenter par un spectacle qui a fait partie du top 10 du club de la presse : Eurydice aux enfers. Indéniablement une très belle proposition.

 

Sur une scène nue et devant une salle comble, un trio improbable et décalé nous scande le début de l’histoire tel un chœur antique..

Eurydice, qui a perdu son amant Orphée, décide d’aller le chercher aux enfers en creusant le bitume et la roche avec ses ongles, jusqu’au cœur des ténèbres. Le trio drolatique nous a décrit cela de façon très originale et d’un ton mélangeant humour et classicisme.

C’est ici qu’arrive Eurydice débarquant en enfer et se présentant devant un agent administratif hilarant et surchargé par la tâche. Elle lui cède ses yeux en échange de l’entrée aux portes de l’enfer.

Non contente d’intervertir les rôles par rapport au mythe, l’auteure et metteuse en scène Gwendoline Destremau brouille encore les pistes en mêlant le ton des grandes tragédies classiques avec un côté très burlesque et exagéré, parfois façon café-théâtre. Le bleu sombre de la lumière et une bande son venue des entrailles de la terre accompagnent parfaitement l’ensemble de la mise en scène.

Nous suivons Eurydice dans sa recherche de l’amour, telle un rite initiatique. Je me suis laissé emmener au cœur de l’enfer et dans son cheminement intérieur. Je l’ai suivi dans son ascenseur souterrain, dans sa confrontation avec Cerbère ou sa rencontre avec la mort jouant le vieil animateur décrépi de soirées Camping – mais qui aurait tout aussi bien pu jouer dans un spectacle d’Olivier Py.

Finalement, elle renoncera à donner son cœur, pour nous prouver que l’amour est plus fort que la mort. Un hymne à la vie comme jolie conclusion.

 

 

Tous les comédiens sont excellents et prennent plaisir et le temps du jeu, et à seulement quatre (avec un musicien qui intervient un peu sur le plateau), ils jouent tous les personnages (même l’ascenseur !), les flash-back comme une parenthèse volée au temps et le tableau des deux créatures d’or (costumes magnifiques et très visuels) apportent encore une force complémentaire et un rythme très cinématographique à cette mise en scène débordante d’inventivité, qui permet de s’approprier le spectacle sans avoir nécessairement, comme moi, les références culturelles de ce mythe important.

Pour sa troisième création, Gwendoline Destremau nous montre avec talent qu’il est possible de raconter des histoires complexes accessibles à tous.

J’ai été carrément touché par la force de ce spectacle qui arrive ainsi à faire la passerelle entre deux univers assez éloignés : le théâtre classique et le théâtre d’humour, qui pourrait presque convenir dans un Café-Théâtre.

C’est aussi pour cette diversité que j’aime le spectacle vivant.

À imaginer dans vos programmations à venir.

 

Eric Jalabert

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