Cendrillon
14 févr. 2024Spectacle de Rebecca Stella et Danielle Barthélemy (Compagnie du Théâtre aux Etoiles - 92) vu le 04/02/2024 au théâtre Le Lucernaire (75) à 11h.
Auteurs : Rebecca Stella et Danielle Barthélemy
Comédiens : Louis Astier, Yohan Leriche, Myriam Pruche et Amélie Saimpont
Mise en scène : Rebecca Stella
Type de public : Jeune public
Genre : Théâtre
Durée : 55 min
Cette adaptation théâtrale revisitée de Cendrillon se déroule au Japon, où quatre acteurs interprètent une version assez moderne et loufoque du célèbre conte en y incorporant quelques jongleries et pitreries.
Cette pièce a un certain nombre de qualités : des costumes et décors propres et sans bavures, des comédiens plein d’énergie et qui n’en font à aucun moment l’économie et de jolies esquisses numériques projetées en guise d'arrière plan et décors (sauf quelques passages complètement ridicules). En outre, la trame narrative est plutôt bien développée et donne un vrai relief à la relation entre le prince et Cendrillon, aspect le plus souvent négligé de cette histoire et des contes en général. Enfin, les personnages, bien que très caricaturés et infantilisés, sont plutôt attachants. Mais quelque chose dans la pièce sonne faux et donne en sortant comme l’impression d’avoir mangé un bonbon trop sucré à la saveur artificielle.
Premièrement, les scènes s’enchaînent mal et sans aucune fluidité : on passe sans arrêt de la chaumière au château avec des changements de décor constants et un gong exaspérant qui marque systématiquement chaque fin de scène. Le Japon, censé être le cadre de la pièce, n’est aucunement présent mis à part dans les décors vidéos, dans l’inspiration des costumes et par quelques mots clefs (essentiellement naruto, saké, zen, origami et samouraï) parachutés sans pertinence ni résultat. Mais surtout, la mise en scène, bien que dynamique, est très lourde et cherche constamment à forcer des effets peu concluants tout en omettant ce qui lui est naturellement accessible. Par exemple, chaque action est appuyée d’un bruitage cartoonesque de la régie censé créer ou renforcer son comique souvent raté (ce qui devient rapidement insupportable) ou encore l’arrière-plan numérique se sent obligé de faire une sorte de mouvement de caméra entre chaque scène comme si notre imagination en était incapable. Tout se passe comme si la troupe avait décidé de faire une pièce de théâtre au Japon sans savoir ce qu’était ni le théâtre ni le japon. Tous les choix -rythme, dialogues, voix, découpage, jeu, blagues- sont pensés comme dans un dessin animé, et cherchent plus à exploiter les recettes commerciales de ce média plutôt que la richesse de la scène théâtrale. Cet effort contre-nature induit un sentiment de dissonance, accentué par la (trop) grande qualité de la production par rapport à sa portée. Au fond, les enfants suivent bien l’histoire et apprécient quelques blagues, mais restent globalement assez froids à l’énergie de la pièce, n’étant, je pense, pas vraiment dupe de son aspect bancal et niais.
À la fin, les comédiens offrent la possibilité aux enfants de se prendre en photo avec leur personnage et vendent à prix libre des babioles utilisées dans la pièce, un peu comme à Disneyland, ce qui est à la fois sympathique et légèrement répugnant à cause du manque d’authenticité du tout.
Alexandre SAINT-DIZIER