Le jeu de l'amour et du hasard
02 févr. 2024Spectacle du Collectif l'Émeute (75) vu le 30/01 au Théâtre du Lucernaire (75) à 21h.
Auteur : Marivaux
Comédiens : Adib Cheikhi, Matthieu Gambier ou Frédéric Cherboeuf, Jérémie Guilain, Lucile Jehel, Dennis Mader, Justine Teulié ou Camille Blouet
Mise en scène : Frédéric Cherboeuf assisté d’Antoine Legras
Type de public : Tout public
Genre : Théâtre
Durée : 1h25
Deux nobles promis se camouflent pour leur rencontre en échangeant plus ou moins incognito de place avec leurs valets. Qui, du coeur ou de la raison, des sentiments ou des rapports sociaux, va triompher au sein cette mascarade ?
Cette mise en scène du « Jeu de l’Amour et du Hasard » est intense, fluide, dynamique et restitue le texte avec beaucoup de justesse. En particulier, les personnages sont vraiment très bien incarnés par les acteurs. On sent véritablement les caractères, les sentiments et les travers de chacun. Les costumes et les décors, également très réussis, favorisent cet effet et, bien que complexes et variés, apportent une clarté qui met en valeur l’excellent jeu des comédiens sans nuire à l’unité de la pièce. La troupe n’a pas peur de développer les émotions, d’emporter le public dans leurs expressions en poussant à bout les personnages et le fait très bien. Tout est appuyé sans être exagéré, ce qui donne un relief remarquable au texte, et permet, pour le spectateur, de vivre une exploration sentimentale intense, si chère à Marivaux.
Tout au long de la pièce, on sent très fort la modernité du texte, la profondeur des mécanismes sentimentaux exposés, mais aussi sa lourdeur sociale, son mépris presque ironique mais dérangeant des classes populaires. De ce point de vue là, j’ai trouvé que la mise en scène manquait peut-être d’un peu de créativité et de recul, même si elle prend clairement le parti de restituer fidèlement le texte. Elle se permet tout de même quelques ajouts audacieux, assez bien amenés mais fonctionnant malheureusement relativement mal. Le langage n’est pas à la hauteur de celui du reste de la pièce, ce qui dénote et casse le quatrième mur assez maladroitement, sans profiter à la globalité autrement qu’en glanant quelques rires. Cela ne me semblait pas nécessaire, d’autant plus que la mise en scène est déjà drôle et que son point fort réside à mon sens plus dans son intensité que dans son humour, dans sa capacité à nous procurer à la fin un beau sentiment de catharsis tout aussi soulageant que nourrissant.
Alexandre SAINT-DIZIER