Oiseau

Crédit photo : Isol Buffy

Spectacle de Anna Nozière et la Compagnie La POLKa (33) vu le 16 février 2024 au Théâtre de Arles (13)

Écriture et mise en scène : Anna Nozière

Avec : Kate France, Sofia Hisborn, les voix de Loubna Dupuis Putelat et Samuel Simon

Scénographie : Alban Ho Van 

Collaboration artistique : Patrick Haggiag

Durée : 1h

Public : Tout public à partir de 9 ans

Genre : Théâtre

Le papa de Mustapha est mort dans un accident de voiture. C’est la rentrée. À l’école il retrouve Pamela qui elle a perdu son chien et ils partagent leur chagrin. Ils rencontrent la petite Françou qui sait comment on va de l’autre côté.

Les enfants de l’école vont alors s’unir pour organiser ces voyages "de l’autre côté" et bien entendu les adultes vont s’affoler. Enfin, surtout la directrice de l’école et certains parents, quand d’autres vont finalement comprendre ces enfants… qui eux ne comprennent pas pourquoi il ne faudrait pas parler de la mort, ni parler aux morts !

Tous les personnages sont joués par deux comédiennes qui nous donnent à entendre la voix des adultes mais aussi celle des enfants, sans mièvrerie, sans tenter de les imiter mais en retranscrivant avec justesse et respect leur parole.

C’est drôle, enlevé, émouvant. Les choix musicaux nous promènent entre le chagrin et la joie. La mise en scène, utilisant différents médias (chant, vidéo, objets miniatures, voix off…) fait exister plusieurs mondes. Les enfants sont aussi présents par la voix et dans la vidéo. 

Le message est clair et bien posé : regarder comment les enfants nous élèvent et nous enseignent. Pourquoi voudrait-on ainsi les protéger de la mort alors qu’elle fait partie de la vie et qu’elle est partout autour de nous ? Laissons-les nous montrer comment inventer une vie possible avec les disparus.

Bien sûr les adultes ne sont pas tous comme la directrice qui voudrait mettre à distance toute émotion dans l’enceinte de son école. Certains savent très bien accompagner les enfants quand la mort s’approche d’eux ; hommage ici leur est rendu.

Ce spectacle intelligent fait le pari de reconnaître aux enfants leur capacité à vivre et à comprendre des ressentis complexes. Les protéger, ce n’est ni leur cacher, ni leur simplifier la vie mais les accompagner, à leur niveau, dans cette complexité ; c’est observer leur manière d’appréhender le monde et les aider à y mettre des mots, à poser des actes pour appréhender la vie sous toutes ces facettes.

Anna Nozière souhaite que ce spectacle ne soit pas cloisonné jeune public et je partage avec elle l’idée qu’il doit être partagé par toutes les générations. Il est, me semble-t-il, salutaire qu’il soit vu aussi par des adultes. Il peut en effet leur donner des clés pour apprivoiser ce sujet délicat de la mort avec les enfants.

Il y avait beaucoup de collégiens dans la salle, qui sont d'ailleurs restés très concentrés, et j’aurais apprécié un temps d’échange à l’issue de la représentation afin que des questions puissent se poser, tant du côté des enfants que des adultes. Ce spectacle, je pense, nécessite de consacrer un temps afin de prendre en compte les ressentis des spectateurs (jeunes et adultes) et d’accueillir les questionnements inévitables.

Marie-Pierre Husson