No Coffee for the Queen
16 mars 2024source Page Facebook Clara Aumann
Spectacle de Clara Aumann vu le 9 mars 2024 à la médiathèque du pays de Lunel (34) dans le cadre des manifestations liées à la Journée des Droits des Femmes.
Écriture, mise en scène et interprétation : Clara Aumann
Genre : solo burlesque « utéro musical »
Son : Maël Souchière
Public : à partir de 15 ans
Durée : 1H15
Parfois, le hasard d’une programmation fait bien les choses, et cette proposition entre en résonance avec l’Évènement de la semaine, l’approbation, le 4 mars, par le Parlement, du projet de Loi permettant d’inscrire définitivement l’IVG dans la Constitution de notre pays. Et par la même occasion je vais pouvoir découvrir une jeune comédienne dont c’est le tout premier spectacle.
Avant le spectacle, Mme RED, c’est son nom, est venue faire un tour et saluer son public devant la porte de la salle. Moulée dans un justaucorps rouge, mettant en valeur ses formes généreuses, talons hauts rouges, cheveux relevés en chignon rond agrémenté d’un chouchou rouge, grandes lunettes d’écaille rouge, rouge à lèvres très rouge, Clara Aumann a indéniablement créé son personnage. L’entrée en salle confirme que le rouge est la couleur dominante de ce spectacle, fauteuil, tapis au sol, portant et guirlande de roses rouges, nappe sur la petite table qui supporte bien évidemment une cafetière, blanche !
Le préambule est à mon sens un peu long… On attend les retardataires, Mme Red va et vient, regarde l’un puis l’autre, compte et recompte les spectateurs, joue de la guitare, et assistée d’un looper, crée précisément « une musique d’attente »… Ce jeu scénique est souvent utilisé dans ce genre de proposition « burlesque », histoire de « préparer » la salle, mais j’avoue que cela m’agace toujours un peu…
Et puis, après une distribution à la volée de préservatifs - car il faut bien le dire, le sexe est dangereux ! - une chanson en allemand, dont la traduction est sans équivoque, même si Mme RED nous dit qu’il s’agit d’une métaphore (ni plus ni moins que les paraboles utilisées dans la Bible …!!), on avance insensiblement dans le vif du sujet. Tout en devisant, Mme RED se tâte les seins, qu’elle trouve énormes, tente d’avaler un café qu’elle recrache illico… alors qu’elle adore çà habituellement ! Les choses se compliquent, et un test de grossesse s’impose. Le temps d’attente de 3 minutes pour obtenir le résultat est l’occasion de faire monter sur scène le « présumé papa, Jérôme », qu’elle taquine gentiment.
Clara Aumann utilise les éléments de garde robe pendus sur le portant pour représenter les différents protagonistes du récit, dont les représentants du corps médical. Son récit évoque les techniques à disposition pour pratiquer une IVG. Elle aborde les choix difficiles, le questionnement, auxquels est confrontée toute femme face à une grossesse qui tombe mal. On entend en voix off un extrait du discours de Simone Veil lors de la présentation de son projet de Loi en 1974 « aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement », et chacun s’entend à reconnaître que cela doit rester l’exception. Ce n’est pas anodin, cela laisse bien souvent des traces psychologiques indélébiles… Heureusement, le geste est aujourd’hui encadré et il n’est plus besoin de recourir aux « faiseuses d’anges », au risque d’y perdre la vie.
Le choix du jeu clownesque permet la distanciation propice à l’évocation de moments difficiles, voire hard, d’autant plus que de nombreuses chansons, accompagnées au looper ou à la guitare, avec de nombreux effets sonores, en play back sur Alicia Keys, agrémentent le récit. Le spectacle se termine par un message émouvant délivré à l’enfant qui n’a pu être accueilli, et par un chant a capella.
Même si le spectacle connaît quelques imperfections, il s’agit là d’une première création, qui s’appuie sur une écriture précise, bien rythmée, et sur de réels talents de chanteuse. Clara Aumann a réellement su créer un personnage en mettant à profit ses caractéristiques physiques, mais très distancié d’elle-même. A tel point qu’on reconnaît à peine Clara, lorsqu’elle revient démaquillée en habit de ville ! Une jeune femme au talent prometteur, à ne pas perdre de vue…
Cathy de Toledo