Funérailles d'hiver
Funérailles d'hiver

Spectacle du collectif des Artisans (69) au théâtre de l’Uchronie

 

Auteur : Hanokh LEVIN

Comédiens : Arno LEON, Lise GILLET, Thibault SCHREVELLE, Estelle RUFFIN, Loïs VIAL, Victor BREDA

Mise en scène : Arno LEON

Type de public : Tout public, à partir de 10 ans

Genre : Théâtre

Durée : 1h15

 

Les "funérailles d’hiver", un spectacle tout jeune qui fait ses premières dates au théâtre de l’Uchronie à Lyon, est un grand road-trip qui suit les aventures du jeune Latshek dont la mère vient de mourir. Avant qu’elle ne meure, une promesse : celle de rassembler à son enterrement les seuls parents qui lui restent. Ladite famille de son côté, préparant un mariage, fait tout pour éviter d’apprendre la nouvelle du décès, craignant de devoir annuler les noces, qui évidemment tombent le même jour que les funérailles.

 

S’amorce alors une longue poursuite, avec d’un côté le jeune homme désespéré et bien résolu à tenir sa promesse, et de l’autre les parents des deux mariés, qui de catastrophe en catastrophe, tentent tant bien que mal d’éviter d’annuler la cérémonie.

La force de la proposition tient à sa grande vitalité. La théâtralité qui advient au plateau est celle de la composition : les figures de chaque personnage sont très dessinées, caricaturales mêmes parfois, mais les comédien.es portent avec plaisir et engagement les rôles. La grande énergie déployée dans le déroulé de l’intrigue, qui ne fait que se décliner tout du long dans de multiples péripéties à chaque fois plus absurdes, permet d’installer un fil dramatique clair et en mouvement.

Ceci dit, souvent, cette efficacité fonctionne un peu à vide : rapidement on comprend comment cette fuite en avant déplace toujours l’intrigue. Le mécanisme compris, la forme commence à faire écran : ce qui advient au plateau finit par n’être qu’une nouvelle déclinaison du même schéma.

Le traitement de toutes ces péripéties vient quand même s’inscrire dans une sorte de gradation : pour échapper au cousin, la famille commence par se cacher sur la plage, elle finira au sommet de l’Himalaya.  

Ce qui fait qu’au final on reste un peu à l’écart  du spectacle, c’est probablement parce que l’ensemble de la pièce est pris dans un même mouvement comique. La sensation qu’on a de l’écriture d’Hanokh Levin, c’est qu’elle semble proposer un regard plus complexe sur ces personnages, pris dans des contradictions internes qui sont un peu écrasées par la forme très composée des figures. De même, les positions sociales des familles au cœur de l’intrigue semblent venir travailler à un endroit de frottement qui n’apparaît qu’en filigrane dans la proposition. On sent tout au long de la forme une volonté d’épouser très fort la dimension comique du texte, mais comme rien n’est jamais vraiment pris à rebours, tous les signes au plateau finissent un peu par converger : le texte, l’énergie, la proposition de jeu, le choix de la théâtralité. Le fait que la dimension dramatique du texte ne soit pas davantage créditée, place la pièce plutôt à l’endroit du vaudeville – avec ces figures très bourgeoises et une théâtralité un peu typée – qu’à un endroit plus hybride, plus contrasté et cruel. Au plateau par exemple, l’humour potache se déploie de manière débridée ; mais on ne sent pas vraiment que cet aspect très premier degré soit vraiment pris dans un point de vue. La sensation parfois que les blagues sont faites un peu juste pour être faites (les histoires de pets, les blagues sur les nationalités…). C’est le sentiment finalement que cet humour pourrait être pris à un autre endroit qu’à travers le prisme du je ris ou je ne ris pas et venir dire quelque chose de plus précis et pertinent sur la situation concrète où se trouvent les personnages, sur le drame qu’ils vivent. Du coup, les blagues seraient énormes. Or elles sont traitées comme des blagues très banales ou quotidiennes.

Après ces premières dates au théâtre de l’Uchronie, la compagnie reprendra le spectacle au festival d’Avignon.

 

Raphaël Sauvage

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