Avant la terreur
26 juin 2024Un spectacle produit par la MC93 (93) et vu au Théâtre de la Colline le 25 juin 2024.
Texte, mise en scène, conception visuelle et scénographie: Vincent Macaigne.
Comédiens : Sharif Andoura, Max Baissette de Malglaive, Candice Bouchet, Thibault Lacroix, Clara Lama Schmit, Pauline Lorillard, Pascal Rénéric, Sofia Teillet et en alternance Camille Amétis/Clémentine Boucher-Cornu/Mia Hercun
Lumières : Kelig le Bars assisté d’Edith Biscaro
Vidéo : Noé Mercklé-Detrez, Typhaine Steiner
Son : Sylvain Jacques, Loïc Le Roux
Genre : Théâtre - performance
Public : Adulte
Durée : 3H
Des échos que j’avais, j’ai toujours évité d’aller voir les spectacles de Vincent Macaigne. Mais c’est la fin de saison, plutôt parcimonieuse en propositions. C’était donc l’occasion de me faire ma propre opinion.
« Avant la terreur » est une adaptation très libre de Richard III. Après l’exposition du cadre, de l’intrigue et des personnages, le tout sur le « ô solitude » de Purcell, on comprend que la pièce de Shakespeare ne sera que le prétexte pour dépeindre notre monde contemporain où règne « l’hystérie de masse dont il est impossible de mesurer l’émotion en temps de guerre ».
Quelques tirades de l’œuvre de Shakespeare sont enserrées dans le texte de Macaigne, inégal. Il peut être très drôle comme ce « il te reste trois morts avant la couronne » ou très politique (Brigitte Macron comparée à un monstre tricéphale). Mais il est aussi affreusement pontifiant et d’une pauvreté parfois désespérante. Il aurait fallu compter le nombre d’occurrences des « ta gueule » pour s’en faire une bonne idée.
Le spectacle est à l’avenant dans ce déséquilibre. Dans le positif, il y a d’abord cette façon de faire vivre au spectateur une expérience théâtrale inédite. Nous sommes, nous les spectateurs, parties prenantes de ce qui se joue. Pas seulement dans les prises à témoin comme c'est souvent de coutume, mais dans le jeu. Nous sommes invités à monter sur scène pour participer à la fête qu’organise Lady Gloucester en signe d’abdication.
L’espace est vide. Des allemandes blanches se lèvent ou descendent au gré des besoins. Une rampe mobile de projecteurs, deux écrans et un sol gadouilleux constituent le seul décor, parfois agrémenté d’accessoires comme des cages prisons ou un lit d’hôpital. La lumière emplit ce vide et dessine, en ombres chinoises, des scènes résolument cauchemardesques.
Mais à part Pascal Rénéric en Richard III, Sharif Andoura en grand ami psychopathe du premier et Sofia Teillet en Élisabeth, les huit comédiens, en voix naturelle ou au micro, ne font que beugler. Ils amplifient la saturation du son (on nous distribue des bouchons d’oreille à l’entrée !), de la lumière, des fumigènes. C’est un parti pris de mise en scène outrancier et grand-guignolesque. Il est légitime dans la mesure où il peut mettre mal à l’aise, moins par la démesure du reste que par la foule que nous sommes et qui obéit aux injonctions avec un certain voyeurisme.
Je suis contente d’avoir découvert le travail de Vincent Macaigne. « Avant la terreur » est une pièce exigeante et totale, plutôt dans le registre de la performance, mais ce n’est pas mon univers.
Catherine Wolff