EMMA
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Spectacle de Live Production (Belgique)  vu au théâtre Buffon mardi 9 juillet à 13.15 h, dans le cadre du Festival Off d’avignon, du 03 au 21 juillet sauf jeudi

 

Texte Dominique Bréda

Avec Julie Duroisin

Mise en scène Dominique Bréda et Laurence Adam

Genre théâtre seul en scène  

Tout public à partir de 12 ans

Durée 1.20 h 

 

Comment le roman de Flaubert « Madame Bovary » peut-il être à l’origine de ce seul en scène porté par Julie Duroisin, dont la bouille à la chevelure flamboyante qui orne l’affiche du spectacle attire immanquablement l’attention ? ? N’ayant pas moi-même un souvenir ébloui de ce personnage, j’ai décidé d’aller voir ce qu’il en était dans ce spectacle qui tourne déjà depuis une quinzaine d’années   

 

Plateau nu, mis à part un siège à accoudoirs dans un coin. Julie Duroisin apparaît titubante en barboteuse, avec la démarche d’un bébé de 18 mois, accompagné de son doudou… Elle s’adresse à l’auditoire, qui bien sûr ne peut lui répondre, puisqu’il s’agit d’une bande de nounours… L’auteur a en effet imaginé que les bébés arrivent au monde avec des connaissances incommensurables, qu’ils perdent rapidement avant la limite des 24 à 30 mois, mais que malheureusement, ils ne peuvent formuler n’étant pas doués de la parole. Je dois avouer que je trouve le concept certes absurde, mais tellement séduisant et drôle !

C’est là que Julie fait sa première rencontre avec le roman de Flaubert, alors que son père la dispute violemment parce qu’ « elle a niqué son Madame Bovary avec ses gribouillis »… S’ensuit une brillante démonstration philosophique pour expliquer que les surlignages au crayon fluo ne sont pas des gribouillis, mais bien un moyen de mettre en exergue les passages les plus importants d’une œuvre… Mais son père ne comprend rien, et comment lui expliquer puisqu’elle ne sait pas (encore) parler. Et franchement pour sa part elle ne comprend pas son intérêt pour cette bluette mettant en scène un personnage névrosé, insatisfaite permanente, alors que ses goûts personnels penchent vers Balzac, Kundera, et peut être un peu de Desproges, de temps en temps.

Le ton est ainsi donné et le rythme ne va pas faillir pendant près d’une heure et demie. Julie va ainsi avancer en âge… De bébé au cerveau surdéveloppé à l’adolescente en pétard contre son prof de français qui veut leur imposer de lire Madame Bovary, cette histoire ringarde d’un type mort, puis à la femme de 45 ans abandonnée par son mari qui cherche du réconfort dans quelques bonnes bouteilles à la cave, où elle retrouve sa bande de nounours et un vieil exemplaire de Madame Bovary… Et enfin, la femme désormais âgée, qui attend la fin à l’hôpital branchée à des machines qui font un bip bip si agaçant « qu’on aimerait bien que ça s’arrête » !

Julie Duroisin navigue d’un âge à l’autre avec habileté, avec pour seul costume un sarouel « évolutif », en attachant ou détachant ses cheveux, en adaptant sa physionomie et sa voix, toujours accompagnée de son délicieux accent belge, et avec seulement un ou deux accessoires. Des extraits musicaux parfaitement choisis accompagnent le passage d’un tableau à l’autre, apportant une légèreté à un texte certes plein d’humour, mais empreint aussi de pas mal d’émotion. De savoureuses références à des spots publicitaires qui promettent monts et merveilles, et à quelques expériences vécues, comme le recours à un groupe de paroles pour personnes en surpoids, sont l’occasion de balancer quelques vacheries émaillent ce parcours de vie Julie

Ce seul en scène est une belle performance portée par une comédienne vraiment attachante. Et bien sûr, elle a fini par lire Madame Bovary, qui était plutôt pas mal au fond…

À ne pas rater. 

 

Cathy de Toledo 

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