Crédit : Sebastian Gomez Lechaptois

Crédit : Sebastian Gomez Lechaptois

Femme non-rééducable

Spectacle de Compagnie la portée (75) vu le Jeudi 18 juillet au Factory la Chapelle des Antonins (84) à 12h15 dans le cadre du Festival Off d'Avignon 2024.

 

De Stefano Massini

 

Assistant·e de production : Olivier COTRO

 

Interprète et mise en scène: Roxane DRIAY et Jóan TAUVERON

 

Créateur lumière : Quentin PERRIARD

 

En collaboration : Reporter Sans Frontière

 

Type de public : À partir de 13 ans

Genre : Théâtre historique et musical

Durée : 1h10

 

« Je n’écris jamais de commentaire, ni d’avis ni d’opinion. J’ai toujours cru et je continue de croire, que ce n’est pas à nous de juger.

Je suis une journaliste, pas un juge et encore moins une magistrate.

Je me limite à raconter des faits. »

 

 

“Vous m’écrivez que je vous éclabousse.

Je ne fais que raconter.

Si je vois que les impôts finance la violence et la torture, j’ai le devoir de l’écrire.”

 

 

La pièce retrace le parcours d'une combattante de liberté médiatique face à un pourvoir autoritaire. Anna Politkovskzïa reprend vie sous nos yeux. 

 

Depuis la guerre en Ukraine, la Russie ébranle la scène géopolitique avec violence pour des enjeux politiques sombres, mais cela ne date pas d’hier. 

L’extermination du peuple tchétchène par le gouvernement russe en est un exemple. C'est une terre d’insoumis et de terroristes hostile aux russes. Il faut les éradiquer dans le sang s’il le faut pour se protéger.

C’est ce qu’entendent chaque jour les russes, mais est-ce la réalité ?

C’est ce qu’Anna Politkovskzïa va tenter de raconter en devenant une spécialiste du conflit russo-tchétchène et un ennemi à abbatre une "femme non-rééducable". 

Elle va se rendre sur place et vivre un cauchemar. Le comble pour une journaliste qui se retrouve sans électricité et sans réseau pour écrire un article (sans parler de l’absence d’eau et de nourriture). Mais elle décide toutefois de multiplier les enquêtes, les analyses et les reportages, en dépit du gouvernement de son pays, la Russie.

« Le problème de la mort n’est pas le pire, tu t’habitues, tu joues.  Elle est tellement présente que tu ne la vois plus. Non le problème, c'est que tout est un problème. »

Depuis le 18 siècle, la liberté d’expression est réduite. Le gouvernement lui pose des barrières, elle ne peut pas se déplacer en Tchétchénie comme elle l’entend, elle subit des pressions, des menaces du gouvernement, des censures, de la torture et une prise d’otage. 

Un dilemme s’offre à elle : vivre et se taire, ou bien mourir et raconter. Pour elle, ce n’est ni un problème ni un dilemme, c’est son travail.

Malheureusement pour elle, son destin est tragique et elle va être assassinée par le pouvoir.

Il y a une grande proximité avec le public. C’est autant un seul en scène qu’un théâtre musical. C'est permis grâce à Roxanne Driay, interprète d’Anna, qui nous emporte dans la vie d’une journaliste russe entre ses désirs, ses peurs avec une touche d'humour.

Mais aussi à Jóan Tauveron, comédien et musicien, il lie le texte avec des compositions musicales, des musiques traditionnelles du Caucase et des performances de chant et bruitiste en direct. Tout cela en interprétant des figures symboliques telles que le rédacteur en chef de Novaïa Gazeta en passant par le soldat russe qui génocide les tchétchènes et le président de la Tchétchénie Ramzan Kadyrov. Associer musique et texte poignant accorde une légèreté à des mots durs et difficiles à entendre.

La pièce retrace le parcours obstiné d’une femme fulgurante qui incarne le courage. On en apprend beaucoup et c'est fait de façon très intelligente. C’est un précieux héritage qui se doit d’être raconté afin de mieux comprendre l’actualité.

Femme non-rééducable est un très beau relais, fait par ces deux comédiens, une histoire remarquable d’une femme incroyable. Il faut aller le voir, pour lhistoire des mémoires.

 

Clara ROCHE

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