Tumultes

Spectacle de l’Epicerie Production (75), vu le vendredi 12 juillet à 20h50 à la Scierie dans le cadre du Festival d’Avignon.

Texte : Marion Aubert

Mise en scène : Lorène Goupy et Allan Beuteau

Avec : Alice Vuillerme, Antoine Corbel, Camille Lhermite, Eliott Lobrot, Laurie-Anne Polo, Léo Conzade, Lorène Goupy, Max Baraké

Cheffe de projet : Lorène Goupy

Aide à la création : Eliott Lobrot

Création lumière : Allan Beuteau

Chorégraphies : Lorène Goupy

Création costumes : Camille Lhermite

Conception décor : Laurie-Anne Polo

Régie lumière et son : Madeleine de Kerros, Allan Beauteau

Public : Tout Public

Durée : 1h20

Effervescence de la jeunesse, le poing levé et la rage au cœur. Génération révolution.

Tumultes raconte l’histoire d’une jeunesse fougueuse en quête de justice. Huit jeunes comédiens, révoltés contre une société qui les écrase, décident de préparer la révolution en occupant un théâtre. C’est le cri d’un cœur épuisé, d’un esprit malmené, qui trouve pourtant encore la force de se battre et de se révolter.

Tumultes est aussi, à l’origine, un travail de fin d’études d’une troupe de jeunes comédiens du cours Florent, qui s’est emparée du texte ô combien actuel de l’autrice Marion Aubert. Lors d’une représentation, l’autrice a découvert la mise en scène et la manière dont les comédiens portaient ses mots. Elle a été profondément touchée par la mise en scène remarquable et le talent hypnotisant des comédiens.

Sur le plateau, tout est blanc : les meubles, le sol et les murs sont peints dans un blanc qui reflète la lumière des projecteurs. Cette scène épurée donne une impression d’immensité, où aucune limite n’existe. Tout est possible sur ce plateau infini, un espace vierge qui permet l’effervescence de la création.

Le spectacle commence. Les huit comédiens débarquent sur scène vêtus de tulle. Les couleurs vibrantes de leurs étranges costumes flamboyants contrastent avec la blancheur environnante. On comprend qu’ils répètent une pièce de théâtre, mais rapidement, ils abandonnent cette répétition pour organiser un événement plus inédit et important : la révolution. À l’image des ouvriers qui occupaient les usines en 1936, Antoine, Polo, Max, Alice, Camille, Eliott, Lorène et Léo décident d’occuper le théâtre. Dans ce huis clos tumultueux, ils vont évoluer, s’aimer, se déchirer, se trahir et se questionner. Qui sait, peut-être changeront-ils enfin ce monde qui les inquiète tant.

Bien qu’écrit il y a neuf ans déjà, le texte aborde des thèmes qui résonnent particulièrement dans le contexte politique et social actuel. Devant Tumultes, on rit, on pleure, on se questionne. On ressent le frisson de la révolte. Depuis nos gradins de spectateurs, on a qu'une envie : se lever et les rejoindre.

Lorsqu’elle écrit la pièce en 2015, Marion Aubert choisit de garder les prénoms de ses comédiens pour nommer ses personnages, ajoutant une dimension personnelle où les comédiens se livrent sur leurs questionnements. L’Épicerie Production a naturellement fait le même choix. Les personnages en deviennent plus attachants. Les huit comédiens nous offrent, avec brio, une véritable ode à l’amitié et à l’acceptation des différences.

Au fil du spectacle, les personnages se dévoilent dans toute leur vulnérabilité. On apprend à les connaître, à comprendre leurs peurs, leurs faiblesses, leurs forces et leurs rêves. Antoine, révolutionnaire aux grandes idées, mais plein de doutes. Polo, qui ne se sent exister que si elle se sent utile et qui aime ses amis plus que tout au monde. Max, qui ne trouve pas sa place dans le monde, qui souffre en permanence et qui se bat autant pour les autres qu’il se bat contre lui-même. Camille, en proie à une relation toxique avec ses convictions. Alice, douce, créative et forte, inconsciente des regards qu’on lui porte. Eliott, leader né, solaire et magnétique, révolté par l’injustice du monde. Lorène, déchirée par un conflit intérieur, qui tente de comprendre qui elle est et ce pour quoi elle veut se battre. Et enfin Léo, silencieux et incompris, prêt à se trahir pour enfin avoir l’impression d’exister.

Chacune de ces personnalités reflète, à sa manière, la jeunesse d’aujourd’hui. Une jeunesse pleine de doutes, en quête de justice, prête à se battre avec toutes les forces qui lui restent. Une jeunesse qui, plus que tout, veut se faire entendre et trouver sa place dans le monde. Exister. Aimer. Vivre et vibrer.

Nous sommes tout un Antoine, une Lorène, un Eliott, une Camille ou un Max, et tous les autres. Nous sommes tous les huit à la fois. Nous sommes cette jeunesse révolutionnaire qui veut continuer d’y croire malgré tout. Nous sommes une seule et même voix qui hurle.

Marceline WEGROWE