La symphonie tombée du ciel
La symphonie tombée du ciel

Un spectacle produit par La Sourde (75) et vu au Théâtre de l’Athénée  le 18 septembre 2024.

 

Direction artistique: Samuel Achache, Antonin-Tri Hoang, Florent Hubert, Eve Risser

Interprètes : Samuel Achache, Antonin-Tri Hoang, Florent Hubert, Eve Risser, Olivier Laisney, Matthieu Bloch, Caroline Peach, Pauline Chiama, Etienne Floutier (en alternance : Agnès Boissonnot-Guilbault), Gulrim Choï, Myrtille Hetzel, Anne-Emmanuelle Davy, Rose Dehors, Apolline Kirklar, Boris Lamerand (en alternance : Marie Salvat), Thibault Pierrard (en alternance : Guihem Flouzat)

Régie son : Julien Aléonard

Costumes : Pauline Kieffer

Genre : théâtre musical ou musique théâtralisée.

Public : Tout public

Durée : 1H

 

Quand Samuel Achache et ses compères Florent Hubert et Antonin-Tri Hoang  sont à l’affiche, j’accours. Pour « cette symphonie tombée du ciel », ils ont intégré Eve Risser. Ensemble ils ont créé un « concerto contre piano  et orchestre » aussi déroutant qu’intéressant.

 

Dans les opus précédents, la compagnie La sourde oeuvrait  à la vulgarisation par la théâtralité de pièces du répertoire. Fidèle à son ADN, il s’agit toujours de mêler théâtre et musique mais, cette fois, dans l’écoute d’une œuvre originale. Le texte interroge la question du miracle. La musique souligne, magnifie, dialogue, incarne les réponses, fruits d’une enquête documentaire et que l’on entend en voix off. La musique est très librement et remarquablement inspirée du Concerto Wq.43/4 pour clavier de Carl Philpp Emanuel Bach. Elle parcourt l’histoire de la musique depuis des chants populaires napolitains jusqu’à Boulez ou Messian en passant par le jazz et l’improvisation. Elle est admirablement interprétée par seize musiciens polyvalents et qui n’hésitent pas, comme c’est de coutume dans la compagnie, à se faire comédiens.

Le dispositif scénique traduit l’ambition de ce mélange des genres et des voix. Le plateau est nu. Des chaises en plastique dessinent une formation symphonique réduite. Disséminés parmi les musiciens, des baffles de tailles et de formes variées font entendre le résultat des micros-trottoirs : ce sont d’abord des phrases très courtes itératives puis deux grandes narrations. L’une en italien surtitré raconte les deux miracles à la Madone des Femminelli dans la région de Naples ; l’autre est le récit d’une avalanche. Pour mieux embrasser les récits, les musiciens, se déplacent, dessinent d’autres ensembles musicaux (orchestre de chambre, fanfare, piano-bar) tandis qu’un mât porte une suspension circulaire dotée de baffles et de projecteurs.

Malgré son exigence, le spectacle n’est pas dénué d’humour. C’est d’abord un chef d’orchestre totalement perdu dans la manutention des dispositifs audios. C’est ensuite Antonin-Tri Hoang qui parodie au saxophone, en la couvrant, une voix qui s’insurge contre la crédulité. C’est enfin Samuel Achache qui tente de nous expliquer ce qu’est une plaque-avant. Tellement oppressé par la réalité imminente du signifié, il se perd  en digressions et finit par être englouti sous l’orchestre qui entonne l’avalanche. C’est elle qui donne le « la » du code vestimentaire, blanc et paillettes ;  c’est elle qui justifie cette robe en écailles blanches qu’Anne-Emmanuelle Davy, dans une danse échevelée, fait bruisser comme de la neige en suspension ; c’est elle, toujours l’avalanche, qui manifeste, tel un métalangage, le titre du spectacle.

« La symphonie tombée du ciel » est moins un spectacle qu’une performance. C’est  une recherche pointue sur les rapports entre textes et musique, un dialogue entre un orchestre et le théâtre. C’est un peu déconcertant au début mais la qualité technique et l’humour finissent peu à peu par emporter l'adhésion.

 

Catherine Wolff

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