Ombres portées
09 nov. 2024Un spectacle produit par la compagnie l’Oublié(e) (75) et vu au Montfort (75) le 9 novembre 2024.
Mise en scène et chorégraphie : Raphaëlle Boitel
Collaborateur artistique, lumière, scénographie : Tristan Baudoin
Interprètes : Alba Faivre, Vassiliki Rossillion, Tia Balacey, Mohamed Rarhib, Nicolas Lourdelle, Alain Anglaret
Musique : Arthur Bison
Genre : Cirque
Public : Tout public
Durée : 1h10
Cette saison, j’ai pris une bonne résolution. Faire découvrir à mes ami.e.s les metteurs en scène et/ou les compagnies dont j’apprécie particulièrement le travail. Comme je suis une femme résolue, c’est ce que j’ai fait pour « ombres portées » de Raphaëlle Boitel ! Quelle déception ! Et quelle gêne que d’avoir invitée une amie à traverser tout Paris pour ce spectacle.
Après l’enchantement de « la chute des anges », je n’ai même pas lu le synopsis. Dommage car je me serai peut-être épargné un sujet douloureux, l’inceste. Le spectacle montre donc une famille sous l’emprise du secret et d’un patriarche imperturbable -malgré quelques titillements de conscience- et que les siens s’efforcent de protéger aux dépens de la victime, ostracisée.
Si cet aspect est bien montré, le cirque et la danse ne sont pas forcément les médias idoines pour aborder cette question. En-tout-cas, Raphaëlle Boitel n’y est pas parvenue. Le spectacle alterne des scènes théâtrales et des tableaux circassiens et chorégraphiés. Le tout s’articule mal. Les premières ne sont pas convaincantes. Le texte est pauvre ; la psychologie des personnages et des mécanismes inhérents à ces familles, inexistante. On atteint le ridicule avec la scène chez le psy. Les six interprètes, sonorisés, ne sont manifestement pas des comédiens. Les voix ne sont pas posées et les émotions sont absentes. C’est pourquoi, les tableaux qui laissent voir du cirque et de la danse sont bien plus intéressants. Malgré beaucoup de gesticulations, force est de constater deux superbes danseurs et deux très belles images. La scène qui ouvre le spectacle se déroule en aérien, à la corde. La victime raconte dans une envolée stupéfiante de gaîté sa vie de petite fille avant le jour « où tout a disparu ». La seconde scène la suit de près. Les traversées de plateau, en solo dansé ou en groupe, ainsi qu’une sorte de jeu de chaise musicale tout en mouvements chaloupés sont de toute beauté. Mais pour un spectacle présenté comme étant du cirque, on reste quelque peu sur sa faim. Le vrai sujet du spectacle, c’est la lumière. Elle est admirablement travaillée en poursuites, en gobos en forme de guillotine, en faisceaux lumineux qui dessinent des diagonales et des angles inquiétants, séparant ombre et lumière. Associée aux fumigènes et à la musique, c’est splendide. Mais c’est systématique et on finit par saturer.
Malgré des qualités, « Ombres portées » prend pour prétexte la tragédie de l’inceste pour présenter un spectacle son et lumière. Je n’exagère qu’à peine. C’est dommage.
Catherine Wolff