Crédit photo : Christophe Bisson

Crédit photo : Christophe Bisson

Doux Amer

Un spectacle produit par le Théâtre du Champ Exquis et vu au théâtre Dunois à Paris le lundi 9 décembre 2024.

 

Adaptation et mise en scène : Laure Rungette, Deborah Lennie, Agnès Serri-Fabre. D'après la légende des Selkies et l'album illustré L'Enfant-Phoque de Nikolaus Heidelbach

Interprétation : Deborah Lennie, Agnès Serri-Fabre

Public : Jeune public - Tout public dès 6 ans

Genre : Théâtre 

Durée : 40 min

 

Bercé depuis l’enfance par la mer et ses légendes, un enfant fait lors d’une baignade une singulière découverte : existerait-il des créatures mi phoques mi humaines ?

 

Doux Amer s’enracine dans le folklore écossais et m’invite à découvrir le mythe singulier des Selkies, créatures imaginaires qui ne sortent des profondeurs de l’océan que pour danser au clair de lune. Elles abandonnent sur le rivage leur peau de phoque pour devenir des jeunes femmes… au risque qu’un homme ne s’en empare et condamne sa propriétaire à rester sur terre à ses côtés. Laure Rungette se saisit d’une légende passionnante, qui laisse la porte grande ouverte aux doubles lectures.

Sur ces prémices fantastiques, Doux Amer aborde la question du lien maternel et de l’émancipation. Plusieurs indices disséminés nous font réaliser, avant le personnage principal, que sa mère est en quête d’une liberté disparue. Des chuchotements excités traversent les groupes d’enfants présents : « C’est elle la Selkie ! »

La question de son départ plane sur la pièce ; mais ce qui pourrait être une séparation déchirante est traitée sous un prisme résolument positif. Épousant la forme du conte initiatique, c’est avec une grande tendresse et justesse qu’est défendue l’importance de laisser chacun·e tracer son propre chemin.

La force de Doux Amer tient autant à l’intelligence de son propos, qui refuse tout raccourci ou binarité ; qu’à l’engagement des comédiennes et la qualité de la scénographie. 

Un impressionnant dispositif sonore et visuel est déployé, pour proposer une plongée sensorielle et immersive dans l’univers marin. Scénographie bi-frontale, alternance de lumières chaudes et froides, sons binauraux tout autour de nous : je me retrouve transportée entre la chaleur du cocon familial et les mystères des abysses.

Les deux comédiennes se partagent trois rôles alternativement, modifiant leurs apparences et modulant leurs voix. Elles tournent autour de nous, défont et refont les cordages du décor dans un mouvement permanent ; nous entraînant dans une frénésie mystérieuse et communicative. 

Je ressors de la pièce comme d’un voyage immobile, avec le goût du sel sur la langue et les dernières paroles de l’enfant encore dans les oreilles : « Plus tard je serais un marin… ou un phoque ».

 

Marine Laffort

--

[Chronique réalisée dans le cadre d'un partenariat avec Avignon Université, par les étudiants du Master Culture & Communication]

 

Retour à l'accueil