Chair de Poules, Théâtre du Bourg Neuf, Avignon
jeu et conception : Aude Léger
Mise en scène : Jeanne Herry
Texte : Maël Piriou
Durée : 1 h

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Trois femmes parlent d'amour dans une cuisine, interprétées par une seule comédienne : Aude Léger. Ou plutôt, deux femmes et une femme en devenir.
Beaucoup de réussites dans ce spectacle, sans doute parce que se conjuguent les talents de jeu, d'écriture et de mise en scène. Dans chacun se révèlent l'inventivité, la fantaisie, ainsi qu'une certaine cruauté non exempte de tendresse.
On a beaucoup aimé les trouvailles concernant le jeu du personnage de Judith avec son écran, qui se joue d'elle jusque dans sa projection sur le mur, où les lettres se moquent, s'entremêlent. Comment ne pas se reconnaître en Judith lorsqu'on a été une femme amoureuse au temps d'Internet ? Les hommes, peut-être aussi, se reconnaîtront dans ces travers dans lesquels nous entraîne la vitesse du web, qui laisse nos pires pulsions circuler sans réflexion dans les fils de la toile, et qui entraîne une angoisse irraisonnée face au silence et au vide de plus de cinq minutes. C'est très drôle et très subtil, empli d'(auto)dérision.
Le personnage de la jeune fille, Alice, est aussi très bien vu. D'une pudeur qui se dit, avec les mots qu'il faut, les vrais, on comprend que la sensibilité de l'adolescente d'aujourd'hui ne se joue plus dans la pudibonderie, mais au contraire dans l'étonnement face à la banalité des choses, la crudité des situations, pour de si grandes émotions.
Simplement, on ne comprend guère ce que fait Alice dans une cuisine, aussi peu, au fond, que Judith (à part peut-être pour la tablette de chocolat), et c'est la faiblesse du spectacle d'avoir voulu plaquer ces deux personnages dans l'univers qui appartient davantage au troisième, Suzie.
Suzie est la plus difficile à cerner des trois. Au début, on ne perçoit pas vraiment son désarroi, mais il en a d'autant plus de force lorsqu'il se révèle. On peut véritablement admirer le talent de Maël Piriou, l'auteur des textes, qui a su mener toute une palette d' émotions de façon très subtile, empreinte de vérité.
Evidemment, le clou du spectacle, peut-être un peu racoleur, est le découpage du poulet, empli de force symbolique. Il est jubilatoire sur le moment, mais on se demande ensuite s'il était vraiment nécessaire,.

 

On adore la fin, dont on ne dira rien, vraiment très jolie.

 

Très bon spectacle, donc, avec d'infimes faiblesses, mené par une jeune artiste sensible, drôle, subtile, présente.

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