Spectacle de la compagnie du Praticable (30), vu le 16 novembre 2014, au foyer d’Aubussargues (30).

 

De et par : Olivier Costa.


vivant-3-toiles-4Genre : Théâtre musical

Public : Tout public à partir de 14 ans

Durée : 75 min

Jauge : 200-300 personnes

 

  

chant-d-horreur-image.jpgDans le foyer de la petite salle communale d’Aubussargues, entièrement équipée pour l’occasion par la compagnie du Praticable qui porte bien son nom, je venais découvrir cette nouvelle création, commémoration oblige. C’était la 2ème représentation de cette toute jeune création, qui va ensuite être jouée dans plusieurs collèges de la région. Le public était au rendez-vous et la salle archi comble !

Les trois comédiens/musiciens nous accueillent en musique dans une ambiance début de siècle et sous des flonflons bleu blanc rouge avec, sur scène, une estrade gradinée qui sera le décor modulable pour les différents tableaux.

Nous sommes le 2 août 1914, et c’est un grand évènement car c’est le baptême du petit Henri !

Malheureusement, c’est aussi le jour de la mobilisation générale.mourir-au-chant-d'horreur-visu2

Aussi, les trois copains musiciens s’embarquent chacun avec leurs idées reçues et nous les suivons dans leur périple vers l’enfer, ponctué de chansons d’époque relatant bien ce voyage, du chant d’honneur… au champ d’horreur.

 

On se laisse très vite embarquer dans les petites histoires de cette grande Histoire et de ces trois amis, figurant chacun les différents états d’esprit présents à l’époque : Emile le belliqueux, prêt à prendre sa revanche sur le boche, Jean le coco pacifiste, et Le Rémi, le cynique désabusé, qui se fout de tout… Sans gros moyens techniques et sans tomber dans l’anecdote, ils nous trimballent dans le train, dans la caserne, à Verdun, dans les tranchées, avec une facilité et un sens de la narration aigus. On est simplement avec eux. L’idée de reprendre des chansons d’époque pour ponctuer et illustrer cette tranche de vie particulièrement sanglante offre un double avantage.

Cela permet d’aborder de très nombreux sujets sur cette période historique (les à priori du départ, les désillusions, les états d’âme de tous, les tranchées infestées de poux, les fusillés pour l’exemple et le « patriotisme » des industriels et du grand capital…) offrant ainsi un regard historique et critique sur cette guerre. Joli travail de recherche !

Mais la forme même de la « chanson » amène de la vie dans cette histoire de mort. Elle permet justement de garder un équilibre très habile entre émotions et légèreté. On ne tombe pas dans le pathos, et les musiciens sur scène prennent tantôt l’accordéon, tantôt la clarinette ou le tambourin et chantent avec naturel et sans rupture de jeu, jouant de la palette des sentiments avec justesse. Beaucoup des chansons m’étaient inconnues, mais à l’image de « La Madelon » ou de « La chanson de Craonne », elles offrent un large éventail d’émotions contrastées.

 

Ce spectacle est une belle composition théâtrale et musicale, proposant un regard aiguisé sur notre Histoire multifacette et complexe. Mais sans moralisation à bon compte et sans jamais donner de leçon.

Cela permet de nous interroger sur ces hérésies qui poussent des gens qui se connaissent mais se détestent, à envoyer se faire tuer des gens qui ne se connaissent pas et ne se détestent pas.

A faire circuler largement, en scolaire mais aussi en tout public dans nos théâtres.

 

Eric Jalabert 

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