le-petit-atelier_Espectaculo-spectaculaire.jpgSpectacle de la compagnie Le P'tit Atelier3, imaginé par Juliette Mouchonnat, vu au théâtre Gérard Philippe (Montpellier) le 13 Février 2013

 

Comédiennes : Anna Melillo et Juliette Mouchonnat

Mise en écriture et en scène : Olivier Labiche (Chaotik Theatre et Cie Maritime)

Musique : Nino Rota, Renato Calsone,  Richard Adler & Jerry Ross, Funiculi-funicula

Lumière : Nicolas Natarianni


Tout public à partir de 5-6 ans                                   

Durée : 55 min                                

Genre : Théâtre poétique et clownesque

Sortie de création

 

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Une centaine de spectateurs ce soir-là, pas de décor. Au fond de la scène un landau démodé, déglingué et débordant d'objets. Dolorès (habillée en homme et jouée par Anna Melillo) balaie en dansant les claquettes, puis essaie maladroitement d'enfiler une jaquette usée. Sa partenaire la rejoint et la voilà prête à haranguer les citadins : "Bienvenue /.../ Vous serez comblés devant cet époustouflant Espectaculo  Spectaculaire qui depuis 6 générations enflamme les plus célèbres scènes du monde". Six générations de circassiens mais, aujourd’hui, plus que deux sœurs : Dolorès et Carlotta (Julie Mouchonnat).

 

Nous les voyons sur la route, de ville en ville, l'un(e) poussant le landau où l'autre dort. Partout, la même harangue de bienvenue au mot près. Parfois, elles voient passer de grands cirques qui déchaînent cris et applaudissements. C'est dur, mais elles s'obstinent et les numéros se succèdent : un lapin blanc qui désobéit, un tango hilarant entre Dolorès et Carlotta en femme à barbe, un énorme éléphant porté par Carlotta... mais, sans chapiteau, que d'interruptions de spectacle ! Chassées par  l'orage, elles fuient toutes deux accrochées au landau, Carlotta chantant sous un  parapluie d'un bleu lumineux. Au fil des jours, Dolorès répète la même harangue et sa voix s'use. On sent leur lassitude. Carlotta réussit sa danse avec une chaise en équilibre sur le nez, mais la police interrompt le numéro de contorsionniste de Dolorès qui peine à se remettre droit(e). La nuit venue, Carlotta s'enfuit, attirée par la musique d’un grand cirque qui passe par là. Le réveil de Dolorès est poignant, ses appels à Carlotta restent sans réponse... Alors, elle ne récite plus les habituels mots de bienvenue, mais le  poème de Prévert :  "Compagnons des mauvais jours (...) Les gens ne viennent pas au concert Pour entendre hurler à la mort (...) etc.". Puis, du fond de la salle un étincelant clown blanc la rejoint, est-ce un rêve ou la réalité ? A la manière de Chaplin, tou(te)s deux nous tournent le dos et partent côte à côte vers le fond de scène, dans un cercle de lumière. FIN.

 

Juliette Mouchonnat et Anna Melillo mêlent acrobaties, danse, jeu théâtral et jeu clownesque dans un spectacle où comique et tendresse sont au rendez-vous. Grâce à un jeu subtil et à l'habileté de la mise en scène, il se dégage un effet poétique un peu aérien. On est souvent dans plusieurs registres à la fois : comique, pathétique, onirique. Il y a des instants magiques, comme la gestuelle des deux femmes poussant le landau en fond de scène qui rappelle ces découpages animés destinés aux enfants d'autrefois.

J'ai apprécié l'utilisation précise des mots, et cette harangue de Dolorès qui, répétée jusqu'à l'usure, finit par être pathétique avant de sombrer, remplacée par le poème "Compagnons des mauvais jours". Les couleurs des costumes sont en accord avec l'imaginaire des personnages : du rouge/rose séducteur pour Carlotta, du noir sérieux pour Dolorès et un parapluie bleu qui fait rêver. Les éclairages de Nicolas Natarianni évoquent la fuite des jours, le scintillement du cirque, la violence des changements d'émotions, les nuits sans sommeil, l'orage, la pluie. Le choix des enregistrements musicaux crée des effets excellents.

 

Les enfants ont ri énormément et ont même montré quelques désirs de participation active. Commentaires et conseils ont fusé. Le côté pathétique du propos n'a pas effleuré les plus jeunes et la fin optimiste rassure. Les adultes ont apprécié les scènes comiques et la poésie inhérente à ce spectacle. J'ai juste un peu hésité sur le personnage de Dolorès dont le côté féminin m'a semblé trop peu affiché : le public comprend-t-il qu'il s'agit de deux soeurs et que cela implique la fin de la dynastie ? 

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