Le Chameau qui voulait être mangé
08 avr. 2010
Création de la Compagnie Peanuts (13).
Vu février 2009 au Théâtre du Tétard à Marseille (13).
Spectacle Tout Public à partir de 7 ans
Conte théâtralisé
Durée : 1h
Avec Emilie Martinez, Edwige Bracq, Stéphane Gisbert, Magali Faure
et avec la participation de stéphanie Louit
Mise en scène Magdi Rejichi, Emilie Martinez
Conte de Bidpaï
Réécriture de Ramsay Wood
Dans le cadre d’un travail autour des figures de bouc émissaire, la Cie Peanuts propose de théâtraliser un conte de Bidpaï, fabuliste indien qui inspira Esope et Jean de la Fontaine pour leurs fables animalières. Une fable vieille de plus de 2200 ans, revisitée par Ramsay Wood.
La réécriture de cette légende est très belle, poétique, drôle et sarcastique.
Lors de l'installation du public, les comédiens s'échauffent sur scène, ils reprennent les mêmes positions et mouvements à la fin de la pièce. Ainsi, l'histoire racontée est vouée à se rejouer sans cesse.
C'est l'histoire d'un chameau abandonné par son maître, qui erre dans le désert et rencontre un Lion. Ce dernier, roi d'une oasis, le prend en pitié, l'accueille et décide de le protéger. Un Chacal, un Léopard et un Corbeau, ses sujets ne partagent pas le même engouement pour ce nouveau venu. Secrètement, ils jalousent les faveurs qui lui sont accordés aussi rapidement.
Or, un jour, le Lion est gravement blessé par un éléphant. Il n'assure alors plus sa fonction de chasseur et ne peut plus nourrir sa Cour de carnivores... La famine s'installe, seul le Chameau, herbivore, n'en souffre pas.
Le Corbeau aidé par ses deux comparses de fortune va élaborer une stratégie machiavélique afin d'en finir avec la famine et avec le Chameau. Celui-ci, naïf et rempli de bons sentiments, va finir par se proposer en festin !
Ce conte aborde de nombreuses thématiques sociales : les places attribuées dans un groupe, les fonctions de chacun, la détention du pouvoir et ses fragilités, les rapports de forces et du coup les alliances enfin et surtout la notion de " Bouc Émissaire " ou comment en temps de crise un individu focalise toutes les tensions, inimitiés et devient le réceptacle de l'agressivité voir de la cruauté des autres membres de sa communauté.
La mise-en-scène gagnerait à ne pas trop s'éparpiller et s'axer sur une lecture de la fable plus claire.
En effet, les comédiens sont maquillés principalement de noir et de blanc, chacun porte un symbole de son animalité : le corbeau tient une plume, le chacal a des oreilles poilus et pendantes, le léopard porte du tissu " léopard " autour de sa casquette, le lion est habillé d'un manteau de fourrure. Le chameau, lui à l'image de son personnage n'a pas de " masque social " il n'est donc pas maquillé, il porte juste un sac sur son dos pour faire allusion à la bosse du dit animal.
Alors que l'animalité est suggérée par les nombreuses expressions de la comédienne qui joue le chameau et mâche continuellement, que le chacal a de multiples poses canines, les autres animaux sont plus suggérés par des traits de caractère : le lion est imbu de lui-même, le corbeau manipulateur et le léopard vieux et dépassé.
Les costumes sont principalement noirs où sombres mis-à-part celui du léopard. Lui porte une veste d'uniforme militaire et short avec des tennis, il fait songer à un " touriste-colonialiste ".
La scénographie est épurée, le peu d'éléments et d'accessoires symbolisent les enjeux entre les personnages.Elle est composée de deux arbres, un feuillu du côté du Chameau et un dégarni du côté du royaume du Lion, de trois chaises indissociables tout comme les trois sujets qui néanmoins ont chacun leur place attribuée, d'un trône munie d'un mirroir et de chapelures au sol pour suggérer le désert.
L'univers formé mériterait de gagner en unité visuel.
Le jeu est parfois très masqué et parfois plutôt naturaliste en fonction des comédiens.
Cette création manque encore de cohérence afin d'harmoniser les nombreuses propositions scéniques.
Ce jeune spectacle porté avec dynamisme sur un sujet poignant et au combien d'actualité est porteur de nombreuses réflexions sur le "Bouc Emissaire" et invitera les jeunes spectateurs à s'y interroger.
La Compagnie propose des lectures théâtralisées sur ce conte en milieu scolaire ou de loisirs suivi de débats.