Compagnie de Poche (38), vue le 9 aout 2014 dans le cadre du Festival Font'Art à Pernes les Fontaines (84).

Adaptation de l’opéra de Mozart pour clarinette, hautbois, comédien et carafes presque vivantes
avec : Anne Zangoli-Bonhomme, Bernard Bonhomme, Michel Seib

vivant-3-toiles-4

 blog-les-noces2.jpg

Aller écouter un opéra ??? Quelle drôle d’idée !!! D’abord, vous n’y entendez rien ! Ces gens qui chantent leurs émois au lieu de parler comme tout le monde et dans un idiome qu’on ne comprend pas, merci bien ! Et puis votre oreille n’est pas formée ! Et de toute façon, c’est un luxe que vous ne saurez vous offrir ! Bref, vous vous sentez totalement illégitime. N’en parlons plus, c’est une idée totalement saugrenue.


Parlons-en justement ! C’est bien pour conjurer tous ces préjugés que la Compagnie de Poche vous présente ces Noces de Figaro. Et c’est un défi d’autant plus remarquable que ce grand opéra se joue sous une toute petite forme, avec une grande économie de moyens…. Et dans la rue !

Le dispositif est donc réduit à sa plus simple expression : deux instrumentistes, un récitant, un paravent, 4 feuilles de papiers et des carafes en pagaille ! Je sens déjà poindre votre curiosité !

En fait, la compagnie de poche reprend à son compte une veille tradition. Proposer aux gens de peu une réduction de l’œuvre pour deux ou trois instruments afin que tous aient accès au divertissement. La version proposée date donc de 1799. Elle a été conçue pour deux flûtes. Elle est interprétée aujourd’hui par une hautboïste  (Anne Zangoli) et un clarinettiste (Bernard Bonhomme). A eux deux, ils jouent les grandes arias, version instrumentale.

Et puis, il y a notre récitant comédien (Michel Seib). Tel un majordome, il prend à charge le récitatif et incarne tous les personnages….en restant sagement assis devant le paravent, symbole de tout le libertinage de la pièce.

Car les Noces de Figaro, version Mozart/Da Ponte, ont tout du vaudeville avant l’heure. Les amants réels ou supposés n’ont de cesse de se cacher dans les armoires, sous les lits, derrière les fauteuils. Et là réside la belle idée de mise en scène de la compagnie de poche : nos intrigants sont des carafes !

Ces messieurs sont représentés par des carafes plutôt carrées et plus ou moins grandes pour signifier le statut social. Ainsi le Comte Almaviva, grand coureur de jupons devant l’éternel, en impose par sa taille à son valet Figaro. Ces dames, toutes objets de convoitise, sont presque égales en taille mais plus ou moins girondes. Notre comédien les manipule, les fait parler, danser, se cacher, leur glisse fleurs, rubans et billets, le tout dans un récit endiablé.

Le contraste est d’ailleurs saisissant entre nos deux concertistes sérieux et tout de noir vêtus comme il se doit et notre récitant à la volubilité intarissable et à la plasticité du visage fort éloquente.

 

Au final, même les plus rétifs à l’opéra – à savoir les ado- restent jusqu’à la fin du spectacle. Pour eux, c’est une jolie initiation au répertoire et qui leur donnera peut-être envie d’aller plus avant, à savoir lire Beaumarchais et écouter Mozart. Pour un public plus averti, c’est un régal d’assister à cette forme tout à fait surprenante tout en révisant ses classiques.

Il est à déplorer quelques accrochages dans le texte. Et personnellement, j’aurais bien aimé qu’un instrument d’une autre famille vienne tempérer les vents. Mais encore fallut-il trouver un concertiste prêt s’embarquer dans une telle aventure, simple, drôle, originale et pédagogique.


Catherine Wolff

Retour à l'accueil