Mirèo-Land
13 mars 2011
Par la Compagnie Beau Parleur (30)
Vu lors de la Générale le 24 Février au Théâtre Christian Liger à Nîmes.
Texte : André BENEDETTO
Créée pour le Festival d’Avignon 1994
Mise en scène : Jean-François HOMO
Avec : Marie-Hélène COURTIN, Carlos MORENO, Alain VIDAL, René FERNANDEZ
Public : Adultes, Ados
Durée : 1h30
Deux frères se retrouvent après une longue séparation. L’un est resté en Provence, sur le domaine familial où il a continué à cultiver la terre. L’autre est parti à la capitale, a bien gagné sa vie dans les affaires et revient avec un projet qui devrait faire revivre la région qui se meurt : un parc d’attractions, de loisirs et culturelles, où comment visiter la région en une seule journée. Monuments régionaux en miniatures (Moulin de Daudet, crèche, cabane du gardian…), bibliothèque d’ouvrages de la région, films en provençal, salle de spectacles, parcours pédagogique dans la garrigue… devraient faire affluer les touristes qui pour l’instant ne font que passer pour accéder à la Grande Bleue. Bien sûr les deux frères ne sont pas d’accord. Monsieur le maire s’en mêle mais ne sait trop que dire car il est partagé entre ce qu’il voit comme une bonne opportunité pour son village et l’amitié qu’il porte à son ami de toujours resté au pays. La tante se désole de cette inimitié qui persiste et s’envenime autour de ce projet et essaye de calmer les esprits avec force limonade et pastis.
Le propos est intéressant car sans prendre parti, les arguments de part et d’autre sont apportés au fur et à mesure que le spectacle avance et le spectateur balance tantôt d’un côté tantôt de l’autre, un peu comme Monsieur le maire. La mise en scène est sobre et laisse toute la place au texte dense. Quelques respirations sont apportées par les monologues de la tante avec ce qu’elle appelle ses ombres : les grands ancêtres et les gloires tutélaires.
La tension qui monte entre les deux frères est perceptible car les deux comédiens habitent leur rôle avec une grande conviction et une belle énergie. Le côté lunaire de la tante lorsqu’elle parle à ses ombres permet au spectateur de s’échapper un peu et nous invite à penser à tous les grands personnages qui ont habité le pays ; dommage qu’elle ne sache pas de la même manière trouver sa place au sein de la famille.
Les parties en provençal semblent apporter beaucoup de plaisir au public local et donnent, pour tous, une belle musicalité au texte.
Le coup de théâtre final ne paraît pas tout à fait crédible et semble un peu déconnecté de tout ce qui s’est joué avant mais la plus grande frustration vient de la fin. En effet des bulletins de vote nous ont été remis à l’entrée du spectacle et nous espérions donc donner notre avis et influer sur la fin de la pièce comme il avait été annoncé. Et bien nous sommes restés sur notre faim (fin !) car le vote s’est effectué à la sortie du spectacle, dans deux urnes différentes (une pour chaque frère) ce qui laissait assez peu de place à la confidentialité des votes ! Un débat devait avoir lieu après le vote mais cela n’a pas été possible pour des questions d’horaires de fermeture de la salle. Ce débat aurait effectivement été intéressant et aurait sûrement un peu atténué notre frustration. Mais n’aurait-il pas été possible de pousser un peu plus loin l’artifice en proposant effectivement deux fins possibles en fonction du choix des spectateurs ?
En dehors de cette petite déception, la Compagnie du Beau Parleur propose toujours des sujets qui ne laissent pas indifférents, connectés avec les spécificités locales, avec un regard objectif qui ouvre au débat.
En espérant que ces pièces puissent être vues par des gens de culture et d’origine différentes afin que les débats aient réellement lieu.
Les organisateurs qui auront envie de montrer ce spectacle devront veiller à cela afin de tirer le maximum de richesse de ce texte d’André BENEDETTO qui voulait interpeller les générations présentes et futures sur l’avenir du pays.
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