Public or not Public
15 juil. 2012 Spectacle de la compagnie L'Esquisse, vu au théatre Notre Dame (tous les jours à 18h15) lors du festival Off d'Avignon.
Dramaturgie et mise en scène : Carlo Bosco
Avec : Stéphane Brel ou Olivier Goirand, Nicolas Dandine, Marc Faget et Jérome Jalabert
Durée : 1h45
Grand coup de coeur ! Longtemps qu'on n'avait pas autant ri !
On sort de "Public or not Public" heu-reux. D'entrée, on est charmé par l'énergie et le délire positif des quatre comédiens. La bonne impression de départ ne sera miraculeusement jamais trahie durant toute la durée du spectacle. C'est un feu d'artifice burlesque et délirant.
Nos quatre compères entreprennent de conter au public (sans jamais oublier sa présence active) l'histoire du théâtre, en choisissant justement ce même public comme fil conducteur. Il est donc question de nous face à eux, et c'est LA bonne idée de départ qui est formidablement bien exploitée. On se laisse embarquer très volontiers dans ce voyage culturel où l'on apprend beaucoup de choses, et où l'on voit défiler tous les genres : des combats de gladiateurs au théâtre kabuki en passant par la commedia dell'arte. Shakespeare ou Rostand sont joués de façon fantaisiste, mais toujours intelligente. Et nos quatre drilles, aux rôles bien définis dès le départ, ne cessent de dévoiler des talents qui nous enchantent : ils manient l'épée, ils miment, ils chantent, ils improvisent et, surtout, nous tiennent à bout de bras au fil de l'action. Notre attention ne sera jamais relâchée mais, au contraire, suspendue à chacun des gestes de ces histrions capables de changer de registre en un éclair avec une facilité déconcertante, et une fougue communicative. Ils se donnent même la liberté de se moquer un peu d'un genre ou d'un autre, mais ce n'est jamais méchant ou gratuit.
Ils réussissent aussi l'exploit de nous donner la sensation de n'être pas qu'un seul spectateur, mais le public tout entier. Ce dernier prend la forme d'une vague dans laquelle nous nous dissolvons, car les comédiens nous donnent une vie qui nous fait tous réagir. Le plus grand bonheur vient peut-être de cela : on ne rit pas seul, on ne rit pas contre, mais on rit ensemble, totalement coupés (pour un temps) du monde du dehors si fragmenté. C'est une belle sensation de vie.
On a envie de parler de Public or not Public, comme le fait son auteur, en convoquant la culture et l'intelligence avec une grande légèreté. Citons alors Bergson. Dans "Le Rire" (un essai sur la signification du comique), il nous informe que rien ne désarme comme le rire" ou encore que "la sincérité est communicative." Passionné et sincère, ce spectacle nous désarme totalement... et c'est bon d'être désarmé. Courez voir Public or not Public !