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Spectacle de la compagnie "Trois... six... neuf"

d'après Virginia Woolf

vu le lundi 8 juillet 2013 à 11h10 à l'Espace Roseau dans le cadre du Festival Off d'Avignon

 

Mise en scène, traduction, adaptation : Marie-Paule Ramo

Interprétation, co-adaptation : Nathalie Prokhoris

Lumière : Véronique Lorin 

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Genre : Théâtre

Durée : 1h10

 

 

C'est un grand bonheur de retrouver sur scène une Virginia Woolf, malheureusement si méconnue bien que constamment présente dans chacun de ses écrits : riante, curieuse, ironique, d'une grande acuité et d'une immense honnêteté d'esprit. Toutes ces qualités ne pouvaient en faire qu'une féministe des plus pertinentes, et une essayiste précise à la recherche constante de "pures pépites de vérité". C'est certainement cette quête, et l'allure so british de Virginia, qui ont donné l'idée à Marie-Paule Ramo de camper Mme Woolf en une sorte de Sherlock Holmes au regard pénétrant et à l'allure fureteuse. Munie d'un parapluie et d'une malle, notre enquêtrice va et vient, dynamique et droite, du campus d'Oxbridge (contraction d'Oxford et de Cambridge, souvent utilisée par l'auteure dans ses nouvelles et essais) à la métropole de Londres, ne lâchant jamais le fil de sa pensée et la profondeur de sa réflexion. Elle explore différents sentiments, de la colère au dégout, de l'incompréhension au mépris mais jamais jusqu'à la résignation ou la facilité de pensée. Est toujours présent son désir de comprendre et de disséquer us et coutumes, histoires, destins rêvés, destins brisés, âmes courageuses, précurseurs et, a contrario, lâchetées et peurs de perdre une position confortable.

 

Nathalie Prokhorsis est excellente dans le rôle. Sa diction est parfaite, son regard pétillant et malicieux ainsi que son jeu subtil et élégant nous captent. Le texte, qui n'a pas été écrit pour être joué, a été retraduit et adapté pour la scène par Marie-Paule Ramo. Il trouve ainsi un nouveau souffle et une vie palpitante. Virginia, ou ses différents avatars, nous livre de ces arguments qui nous ont souvent manqués avant qu'on la découvre. Elle leur donne une existence imbattable. On se laisse embarquer par les vagues de sa réflexion, comme dans l'un de ces romans. Nous naviguons avec elle, emportés par une démonstration aux failles qu'elle tente de combler, toujours, malgré l'absurdité de l'âme humaine et la difficulté faite au génie d'éclore dans la pauvreté et l'enfermement.

Dans ce spectacle, on ouvre les fenêtres, les malles, mais surtout les esprits. Toutes les chances seront données aux destins, tous les destins, mais surtout ceux qui ont du génie pour la littérature ; ceci grâce à la force de pensée, à l'énergie et à la pugnacité extraordinaire de Virginia, brillamment rendus dans ce jeu, cette mise en scène et cette mise en lumière.

 

Merci à La compagnie "Trois... six...neuf ", qui "oriente ses choix vers des écrivains femmes, avec le souci d'offrir à chaque parole un espace où se déployer", de nous donner à (re)découvrir avec tant de justesse et de cohérence un texte fondamental dans l'histoire du féminisme. Un texte malheureusement si peu lu, tout comme la production entière de Virginia Woolf. Venez au moins l'écouter à l'Espace Roseau ! Vous ne serez ni déçus, ni ennuyés, bien au contraire...

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