Y revenir, vu le 30 novembre 2013 à Sortie Ouest, Béziers.

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De et par Dominique A

 

vivant-3-toiles-4Durée : 1h20

Genre : lecture musicale


 

 

 

Y revenir c’est indubitablement ce que j’ai eu envie de faire à l’issue de la très belle lecture musicale du livre de Dominique Ané, ce samedi 30 novembre, à Sortie Ouest, Béziers. Témoin nostalgique, conteur thérapeutique ou chanteur romantique…?  Il n’y a décidément que des mots en -ique qui puissent décrire si fidèlement mon sentiment pour cet être si empreint de sensualité, de force et de fragilité. Dans une lumière (et une fumée) mémorable (la veille le Théâtre de Villeneuve-lès-Maguelone avait fait évacuer la salle avant le spectacle, les fumigènes ayant fait sonner l’alarme), nous plongeant dans un son et une intimité aussi forts que cristallins, l’ancien punk New-wave auteur-compositeur, interprète et s’émancipe une nouvelle fois de la « chanson française à texte » pour nous livrer le sien.

 

« Y revenir », publié en 2012 chez Stock, raconte sa jeunesse, ses angoisses et ses souvenirs de Berck (ah non, pardon, de « Provins »), ville au demeurant pourrie de Seine et Marne (non, Dominique A n’est pas Nantais !), où seule la mélancolie balayerait les paysages de l’ennui. D’un coup de frottement de semelle sur l’asphalte, la guitare à la main, la distorsion ronflant derrière ses samplers et ses pédales wawa, Dominique A nous ouvre (dans un cadre minimaliste qu’on lui connaît trop bien) l’écrin de sa petite cité médiévale. À travers un récit de paysages, de sensations, de portraits, tristes et décalés, Dominique A, l’oiseau qui chante dans le vent glacial, remonte le temps vers son adolescence, à la recherche de sa mélancolie naturelle et des fondements de son unicité. Provins, la ville qui « désole et isole […], un lieu âpre, où vivre ne se faisait pas. »

 
Cette expérience de l’enfant unique, isolé à l’intérieur de lui-même, confronté très jeune à la sensibilité et à l’étrangeté du monde, m’avait pour ainsi dire davantage imprégnée à la 1ère lecture du texte, lors de sa parution en 2012, que dans la lecture-concert de samedi. Dominique A a sans conteste la corde, le cœur, et la voix sensibles. Quand il chante, quand il joue et quand il parle même. Mais je ne serais pas tout à fait objective si je lui accordais le même talent à la lecture de son livre… Détaché, un peu comme quand on raconte l’histoire d’un autre (sauf que là en plus il joue et bidouille ses machines), Dominique A m’a un peu déçue dans l’aspect quelque peu académique de sa lecture. Un peu comme s’il avait lu en décalage, des choses tristes avec trop de légèreté, dégagé désormais de son analyse introspecto-thérapeutique (?), le chanteur abandonne peu à peu l’histoire elle-même et lit dans la froideur, des passages qui pourtant à la 1ère lecture m’avaient bouleversée. N’est pas lecteur qui veut, quand bien même il s’applique. Je n’avais pas pris ce texte comme un support à la musique.


Ce que j’aime chez Dominique A, c'est sa musique, son authenticité, son personnage, sa force et sa sensibilité, et je suis heureuse qu’on puisse mieux les découvrir encore avec « Y revenir », texte d’une sublime sensualité. Mais j’avoue un petit peu moins aimer la contenance de l’artiste « comblé » dont peut parfois faire montre Dominique A dans sa lecture un peu trop "détachée". J’imagine que l’exercice n’était pas tout à fait son style. Pour votre humble serviteur, et sans leçon de morale, lire en public, c’est incarner son histoire au maximum. C’est la conter, comme vraie. Or le tort de ce genre d’exercice artistique, c’est qu’en se répétant, et quand ce n’est pas fait par quelqu'un dont c'est la profession, avec le temps, il se délite…  Un comédien qui lit n’aurait pas lu le texte comme le chanteur, j'en suis persuadée. « Y revenir », c’est l’envie qu’il me reste à l’issue de cette représentation, ne serait-ce que pour redécouvrir l’univers de l’autre, dont on oublie parfois qu’il nous construit, nous modèle, nous entoure. L'artiste est superbe. J'aime toujours autant sa musique. Et je trouve son livre touchant au possible. Pour ma part, j'y reviendrai, mille fois, les deux à portée de main...


(Par chance pour ceux qui ont raté le spectacle, une vidéo est diffusée chez nos amis de http://liveweb.arte.tv)

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