Le silence des pantoufles
31 juil. 2009Porté sur les planches par : Compagnie Manuel Pratt
Interprété par : Manuel Pratt
C’est un spectacle de: Théâtre tout public (durée : 1h10)
Ce Spectacle a été vu le : 30 juillet 2009
Dans le cadre de : Avignon Festival et Compagnies : le Off 2009
Et le lieu du : Théâtre de La Tache d’Encre - Avignon
En résumé :
C’est un One Man Show politico-social, mais pas trop.
…Mais encore… :
Un One Man Show, c’est souvent l’histoire d’un mec qui faisait rire les autres sur les bancs de son école en disant « pipicacaprout ». On le retrouve quelques années plus tard aux réunions familiales exceptionnelles relançant « pipicacaprout » à l’assemblée éméchée, et ça marche. De fils en aiguilles à tricoter parce que c’est pas fin, ce personnage passe sur la scène d’une école de théâtre parce qu’on lui a dit « oh, et bien tu devrais faire du théâtre ! ». Mais ne sachant dire et surtout penser autre chose que « pipicacaprout », b’en il se fait virer de la dite école de théâtre. Alors, furieux, la colère au ventre, il va gueuler dans la rue « pipicacaprout » et dans un élan de sursaut de réflexion que seul ce type d’être humain sait avoir quand il est au pied du mur, il va inventer un titre de spectacle qui fera sa gloire. Ce sera par exemple : « pipicacaprout ne suce pas que de la glace » ou « pipicacaprout est un chic type »… Heureusement pour lui : son public existe, souvent nourri dès sa plus tendre enfance lui aussi par les blagues du copain de réunions familiales, etc… Bref le genre de public dont on dit qu’il a « gardé son âme d’enfant »…et le Q.I qui va avec. Le plus « excellent », dans cette histoire, c’est qu’on nous ressert le même titre un an, deux ans, trois ans au festival d’Avignon. Ces show men nous récupèrent leurs affiches en fin de festival pour nous les recoller l’année qui suit… on se rappelle de certains autocollants très collants au portrait en noir et blanc qui survivaient d’une année sur l’autre… Le top du top étant bien sûr le « arrête de pleurer pipicacaprout » qui se décline en version 1, 2, 3… comme autant de Terminator !... Bref c’est ça, du One Man Show.
« Bonjour monsieur Pratt… Vous faites quoi ?... Ha ?!... Bon. Dommage. Mais quand même je vais venir vous voir parce que, m’enfin voilà… bon je viens… »
Monsieur Pratt fait son One Man Show entre en scène à la Tache d’Encre. Il parle de lui, cinq minutes : l’auto dérision ne nuit pas, bien au contraire. Il commencera donc par se tirer dans les pattes, rire de lui-même… plutôt sain comme comportement si on veut se moquer des autres… et puis zou !... le personnage, les personnages arrivent, se succèdent : culs-bénis, allumés d’OVNI et compagnie, autant d’entités créées afin de nous démolir ce que la société nous construit chaque jour de pourri. Et ce spectacle : « le silence des pantoufles » nous rappelle peu à peu que nos consciences s’endorment, s’anesthésient au point de faire oublier le son des bruits de bottes qui passent devant nos portillons bien d’chez nous. Et cette culture à deux balles qui tapisse le Festival de pancartes multicolores autant que celle à cent balles qui se joue dans la cours du In, tous autant subventionnés qu’ils sont, nous encartonne l’esprit. L’état (à de rares exceptions près) n’aide que les endormeurs de conscience.
« Réveillez vous, bordel ! Vous rigolez encore, mais plus pour longtemps !» C’est ce que Monsieur Pratt nous raconte, nous joue, nous conte à travers les personnages qu’il incarne sur scène, parce qu’il est un comédien, un auteur et qu’il ne se contente pas de se mettre en scène de manière infantile comme cela se fait ailleurs, mais bien de nous faire « son théâtre » à travers une véritable création qui se renouvelle chaque année.
Ce genre là de spectacle est en voie d’extinction. Il s’efface de notre mémoire collective avec la disparition de Desproges, Bedos (il est encore vivant ?...) et compagnie ; oubliée l’époque où France Inter avait son propre tribunal avec ses avocats, sa défense et son jury en délire… (Tiens, ça me rappelle un autre de vos spectacles, ça…). Monsieur Pratt : on aimerait tant vous entendre à 11h sur une radio nationale, ou vous voir à 19h sur une chaîne du groupe « France Télévision »… à une autre époque, ce rêve eut été possible, aujourd’hui, on ne peut même plus en avoir l’espoir… Merci donc de nous faire rire intelligemment de la connerie humaine… Purée de bruit de bottes ! La vôtre, de botte, celle que vous nous collez au derrière n’est pas subventionnée ; mais au moins ce geste, cette intention à l’avantage de s’exprimer en toute liberté. La liberté est un luxe non conventionné qui ne s’achète pas. Merci de nous faire partager cette richesse là.
Actualité :
A la Tache d’Encre jusqu’au 31 août 2009