Korczak, murmures dans labîme
06 avr. 2007Vendredi 23/03/2007 au Petit Théâtre, 4 rue Pierre Duclot, 38000 Grenoble.
D’après :
"Le journal du ghetto" et "Herschele et autres contes" de Janusz Korczac
"Le journal du guetto" de Yehoshua Perle
Scénario : Fernand Garnier
Comédiens-lecteurs :
Elodie David
Romano Garnier
Bruno Deldon
Fernand Garnier
Tout public à partir de 11 ans.
mèl :
D’un côté de la scène : Fernand Garnier, assis à une table de travail, "interprète" tour à tour deux personnages qui ont vécu et retranscrit la vie du ghetto aux heures sombres de l’Histoire : le premier est le récitant, il décrit le cadre historique des événements. Le second est Janusz Korczac lui-même qui tient son journal. Le ton de ce dernier est intime, tourné vers l’intérieur, vers une pensée, des réflexions sur les évènements et l’étau qui se referme jour après jour.
De l’autre côté de la scène, assis côte à côte : trois comédiens prêtent leurs voix aux personnages de conte de Korczak, mais ce pourrait être tout aussi bien certains de ces enfants qu’il avait sous le regard, ou encore lui-même, peut-être, étant enfant. Un probable mélange de tout ça ? Herschele est le gamin même qui voue une admiration sans borne à son grand frère et qui est plus tard celui qui guide plus petit que soi, déjà ; un gamin qui a soif de vivre et de découvrir, qui a appétit de tout et qui veut comprendre.
Au coeur des nuits dont une sera "la plus silencieuse", des mots se murmurent : "Les enfants sont de plus en plus légers... Il n’en restera plus qu’un souffle...". Il y a aussi ces questions, lancinantes, auxquelles l’homme ne peut se soustraire : " Qu’as-tu fait pour survivre ?" S’il faut montrer aux enfants comment courir, Korczac sait très bien que là où il va les accompagner, ce sera au bout des rails et au bout du bout de cette philosophie qui l’a tenu en éveil toute sa vie.
Bien sûr, au coeur de cette lecture : la communauté juive avec ses rituels, ses croyances. Mais au-delà de ça : la question de l’Humain et du respect de l’autre, dans ce qui fait ses spécificités. Korczac était un Grand Bonhomme qui est allé au bout de ses convictions et n’a pas fait de concessions à ce qu’il croyait vrai. Et les paroles qui nous sont rapportées là nous touchent tant elles sont pleines de sens.
Les textes proposés s’inscrivent parfaitement dans la campagne contre le racisme. Ils mériteraient d’être entendus ailleurs et par d’autres pour ne pas être seulement échos du passé mais force d’espoir et de réflexion(s) pour nous autres. La formule qu’offre la lecture est tout à fait adaptée parce qu’il n’y a pas obligatoirement nécessité à dire avec choix marqué de mise en scène. Si le projet initial prévoyait de mêler mots et gestes au-travers d’une collaboration avec le Ballet Théâtre de Jérusalem, ce qui n’est actuellement pas du tout sûr de déboucher, il serait dommage que ces textes n’aient qu’une courte vie alors que des jeunes pourraient sans conteste bébéficier de leurs enseignements. Dans ce cas-là, les didascalies mentionnées par la comédienne auraient probablement à être écartées ou du moins encore épurées. Et si le ton est à l’intime pour ce qui concerne les propos des deux représentants du guetto, il ne faut malgré tout pas oublier que le son doit porter , même dans le murmure.