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08 avr. 2014Spectacle de "La compagnie du Loup" (38) et "Les gens de Passage" vu le 10 mars 2014 au théâtre des Clochards Célestes (69)
Auteur : Gilles Granouillet
Comédienne : Sophie Assante
Mise en scène : Jean-Marc Galéra.
Durée : environ 1h
Genre : théâtre
Public : tous à partir de 12 ans
Avant même que les éclairages ne s’abaissent, nous ne sommes plus un public passif, mais des parents d’élèves participant au décor de la pièce. En effet, une fois installés dans la salle, la personne chargée de la billetterie annonce que le professeur principal est en retard et que nous devrons donc attendre un instant pour commencer la réunion.
Une femme se lève parmi le public et se met à nous parler, nerveusement, un sac de course en guise de sac à main. La pièce est lancée. Cette femme nous raconte sa vie depuis son enfance jusqu’à aujourd’hui et surtout celle de son fils qui était autrefois dans ce collège. On ne peut pas l’avoir oublié, son fils, c’était une légende dans le genre garçon difficile.
Les assistantes sociales et les réunions chez le directeur, puis surtout cette "boîte" dans laquelle elle ne veut pas voir son fils enfermé, ont été son quotidien pendant des années. Elle prend progressivement possession de la scène, de la place que le professeur principal n’occupe toujours pas. Puis elle nous raconte, comment elle a voulu prendre les choses en main, offrir un destin à son fils autre que celui d’"enfant difficile". Il sera comédien, puisqu’il a été conçu dans un cinéma. S’enchaînent alors les castings jusqu’à celui qui bouleversera leur vie et qui explique pourquoi elle est ici maintenant, quatre ans après la déscolarisation de son fils.
Sophie Assante, seule comédienne sur scène, s’approprie parfaitement la langue particulière que manie Gilles Granouillet. Une écriture à la fois familière et travaillée. Un vocabulaire simple énoncé dans une syntaxe originale qui s’adapte parfaitement à la mission que l’auteur donne à son personnage : faire sortir les mots de sa gorge une bonne fois pour toutes et tant pis s’ils sont à l’envers ou qu’ils se répètent, ils sortent et touchent juste. Sophie Assante interprète avec brio une panoplie d’émotions collant à un personnage lunatique, habitée par une rage de vivre qui la fait passer du rire aux pleurs en quelques secondes. Un brin de folie parfois qui explose sur scène et qui est loin de déplaire car enfin, c’est dans sa folie que l’homme est le plus vrai.
Enfin quelqu’un qui parle d’un sujet "sensible" sans verser dans le mélodramatique ! Et c’est tellement plus efficace… Cependant je pense qu’il s’agit d’une pièce qui développerait tout son potentiel en visant un public précis déjà sensibilisé à des questions telles que celle d’être une jeune mère célibataire. Elle mériterait d’être jouée dans des structures pédagogiques par exemple, plus que dans des théâtres, même si la configuration des Clochards Célestes permettait d’entretenir une proximité avec le public (peu de sièges et scène étroite) nécessaire à la mise en scène.
Doriane Thiéry