A la Guinguette à Fontaine (38)le 20/10/2006

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Muriel Roux, comédienne
Benoît Kopniaeff, metteur en scène
Jean-Christophe Crapiz au piano

Une comédienne en scène, qui balaie du regard la salle et passe de table en table, souhaitant un bonsoir. Une manière, je crois, de percevoir un brin de ce que les gens promènent avec eux pour s’en saisir ensuite : qu’il s’agisse d’une oeillade, de l’approche d’un corps, d’un petit tour de danse... Le temps du théâtre s’égrenne déjà sans qu’il en soit encore tout à fait question.

Puis vient le temps de dire, de "se" dire, comme on va à confesse, comme on se dit à soi. Les visages croisés rappellent des gens d’une vie, les moments du sourire ou du coeur qui se pince. Mais de derrière le bar, la comédienne, regard au front, lâche les mots de la guerre, celle qui fut la première du siècle d’avant le XXI, avec combats sanglants alors que sur l’arrière, les femmes tiennent les rennes pour mitraille et canons.

Sur fond de canardage, tandis que roule piano, elle rencontre Landru et échappe de peu aux fumées de ces vies tenues entre ses mains.

On est dedans-dehors, et pris par son regard, la gouaille des mots d’avant, même si ceux-là parfois nous demeurent obscurs. Un temps bien révolu, loin de la niaiserie.

Entre pudeur, amours qu’elle a cherchés, peut-être même trouvés ou auxquels elle a cru, ne serait-ce qu’un temps, et impudeur de soi, elle livre tout à trac.

La musique reste en touches, en minces tranches jouées de loin, comme sont loin aussi, laissés là-bas au pays cul-terreux, ces deux fils oubliés, pas vraiment désirés qui rappellent leur existence au jour même de leur mort, tombés au front de guerre qui n’est plus la première mais a numéro deux.

Dans la salle confinée, il y avait plaisir et gêne bien mêlés, des spectateurs d’un soir en personnes incarnées. Tout un siècle traversé : un petit siècle en somme.

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