Lisa : il a enlevé la Joconde et elle a deux mots à dire à ce sujet
25 juil. 2015Spectacle de la compagnie Théâtre du Kalam (92), vu le 19 juillet 2015, au Théâtre des Barriques à 16h30, à voir du 4 au 26 juillet dans le cadre du Off 2015
Auteur : Fiona Leibgorin
Mise en scène: Cyrielle Buquet
Interprétation : Blaise Moulin et Aurélia Hascoat
Genre : Théâtre
Public : Tout public
Durée : 60 min
Un sujet improbable : on a volé la Joconde, et ce vol est le fruit de Francis, un gars simple de banlieue dont la culture générale s’arrête à Platini et à la télévision. Et cerise sur le gâteau, cette Mona Lisa parle comme vous et moi, heureuse d’être sortie de sa prison dorée.
Le dispositif scénique est simple mais original et efficace : nous sommes dans l’appartement de Francis et le tableau accroché au mur est habité par une comédienne (Aurélia Hascoat) qui, malgré l’invraisemblance, est crédible dès les premiers mots.
Ça sent la bricole, mais je me suis bien laissé emmener dans cet échange sur les préjugés, sur la culture, sur la vie et l’immortalité.
Car après la surprise de parler à un « dessin », Francis échange volontiers avec cette star de l’art, promue à une immortalité planétaire. Et sortie d’un silence forcé de plus de 500 ans, Mona Lisa est très heureuse de rompre sa solitude… même avec un idiot !
Une façon d’entrer dans un grand nombre de sujets que l’on n’attendait pas. Le questionnement sur la connaissance, par exemple : est-on idiot quand on ne sait pas les choses ? Ou la marchandisation de l’art : traitant Mona Lisa de produit dérivé et d’icône surfaite. La célébrité absolue et la solitude qui en résulte, la condition de l’homme et le sens des réalités… Bref, c’est riche, drôle, sans prétention et instructif.
Ces deux-là, enfermés dans leur monde si différent, arrivent pourtant à découvrir les autres regards possibles de cette complexe réalité, et nous offrent un peu d’espoir pour l’avenir. Une autre façon d’appréhender la culture de classe.
Alors bien sûr, on n’y découvre pas les secrets cachés de la Joconde (même si elle explique un peu son mystérieux sourire), on ne parle pas de la place de cette peinture dans la chronologie de l’art, ni des raisons de ces différences de classes. Mais qu’importe. Cela offre une porte d’entrée à un public curieux, venu nombreux, pour découvrir ce moment de théâtre accessible.
J’étais un peu dérangé parfois par le côté un peu caricatural de ce Francis un-peu-rase-moquette, forçant le trait alors que ce n’était pas nécessaire. Il se trouve que j’étais assis à côté du comédien qui prenait la relève du rôle dès le lendemain.
Alors, il reste quelques jours si vous voulez le découvrir pour vous faire une idée.
Eric Jalabert