Attention chef-d’œuvre !

Compagnie L'idée du Nord
Théâtre Artéphile
Vu le samedi 14 Juillet à 19h40

 

Texte : Denis Lachaud
Mise en scène : Pierre Notte
Avec : Benoit Giros
Lumière : Eric Schoenzetter
Costume : Sarah Leterrier


Théâtre
Durée : 1h10
Première à Avignon

 

Je termine ma petite semaine avignonnaise en allant voir une dernière pièce jouée au Théâtre Arthéphile. J’aime finir en beauté, emporter dans mes bagages les impressions et les affects que m’ont laissé un ultime spectacle que j’espère évidemment réussi.

Avec « Magie Lente », mon désir est comblé.

 

C’est dans la plus grande des simplicités que nous sommes accueillis par le comédien Benoit Giros. Il ne semble pas en jeu, c’est toute sa force. Il est là, simplement, et prend la parole. J’oublie la scène, j’oublie les conventions du théâtre, j’ai devant moi quelqu’un qui me raconte « un cas psy » ; Mr Louvier, traité pour schizophrénie pendant 10 ans sans résultat et pour cause… Il n’est pas schizophrène.

 

Le comédien est à la fois pyschiatre et patient, il passe d’un rôle à l’autre d’une manière imperceptible et redoutablement efficace. Le texte de Denis Lachaud expose le travail de la prise de conscience d’un être humain, un réveil obligatoirement lent pour être acceptable. C’est remarquablement bien écrit, réaliste quand aux résistances et aux progrès du patient, délicat et cru quand au thème développé.

 

L’éveil de M. Louvier se fait au rythme des séances qui se terminent comme dans la vraie vie par un « On va s’arrêter là pour aujourd’hui » du psychiatre. Le comédien ponctue le tout par un changement d’éclairage qu’il déclenche à vue et un léger déplacement scénique. Cet espace-temps en suspension me permet de digérer les terribles réminiscences que le patient se révèle progressivement et nous donne simultanément à entendre. Je crois sentir dans le public une émotion qui s’amplifie au fur et à mesure du processus de travail thérapeutique du patient.

 

Je sors de là secouée, silencieuse, émue. Je suis heureuse de ne pas avoir prévu d’aller voir un autre spectacle après ça. Au regard du sujet très délicat, il aurait été facile de se tromper, de tomber dans les ornières d’un pathos outrancier mais la compagnie L’idée du Nord nous offre ici un chef-d’œuvre d’une très grande délicatesse, équilibré dans l’excellence, tant par le brio du comédien que par une mise en scène épurée. Quand à l’écriture de Denis Lachaud, elle me fait penser à une phrase de Léonard de Vinci qui, je trouve, lui va très bien : « la simplicité est la sophistication suprême ».

 

F.P.

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