Affiche du spectacle

Affiche du spectacle

Les poupées persanes

Spectacle de Aïda ASGHARZADEH (75) vu le 02/11/2023 au théâtre La Pépinière (75) à 21h00.

 

Auteure : Aïda ASGHARZADEH

Comédiens : Aïda Asgharzadeh, Kamel Isker, Azize Kabouche, Toufan Manoutcheri, Sylvain Mossot, Ariane Mourier

Mise en scène : Régis Vallée

Type de public : Tout public

Genre : Théâtre

Durée : 1h35

 

En 1979 eut lieu la révolution iranienne, transformant le pays en république islamique et broyant nombres de destins au passage. Trente ans plus tard, la vie continue tant bien que mal à des milliers de kilomètres de là.

 

Les poupées persanes est une très belle pièce, drôle, pleine d'émotions, de surprises et de bienveillance. On y passe du rire aux larmes avec un naturel déconcertant, de la petite à la grande histoire sans s’en apercevoir ; on passe de la mort d’une mère au bug de l’an 2000, du soulèvement d’un peuple à l’apprentissage du chasse-neige, le tout avec justesse et simplicité. Le décalage entre les situations, sans être sacralisé, est à chaque fois traité avec plein de respect et de douceur, dans un bel équilibre entre légèreté et gravité, entre rudesse et délicatesse, si bien que l’on a plus l’impression de glisser sur le relief de l’histoire que de subir les secousses divertissantes d’une montagne russe.

Ce que j’ai trouvé remarquable dans cette pièce, c’est le degré de maîtrise de son cadre, à quel point chaque choix y est assumé et cohérent. On n’essaie pas de nous enseigner ni de nous convaincre de quoi que ce soit. On ne prétend pas détenir les clefs de l’histoire ni faire du grand art. Il s’agit simplement de nous conter une histoire pleine de vie, une histoire symbolique mais pas moins touchante, une histoire simple, pleine, grave et amusante tout à la fois. Et c’est fait avec tant de soin et de précision qu’on en ressort grandi et émerveillé, comme après la contemplation d’un bel ouvrage. Le rythme est quasiment parfait, tout s'enchaîne sans rien brusquer, grâce à une belle synergie du texte, de la mise en scène et des décors, tous chargés d’intelligence et de sensibilité. Chaque personnage, tout en étant caricatural et symbolique, est plein de profondeur, de chaleur et incarné avec brio par les acteurs. Chaque petit dialogue, tout en portant cette exagération propre au théâtre de boulevard, n’en est pas moins fin et subtil, ce qui donne une profondeur supplémentaire à la comédie. On n’a pas l’impression de rire parce que c’est drôle, mais parce que la vie qu’on nous montre l’est. Seule la résolution finale semble un peu précipitée mais peu importe car, à ce stade, tout est déjà dit.

L’essentiel de la matière de cette pièce relève du symbole : du choix des lieux, des personnages, des situations jusqu’au nom même des protagonistes. Et sans prétendre leur donner un propos au-delà de leur portée, la pièce réussit à dire quelque chose de fort, de subtilement ancré dans une légèreté assumée. Si bien qu’à la fin, on ne comprend pas mieux ce qu’ont pu vivre les contemporains de la révolution iranienne mais, pourtant, on a pleuré pour eux, on a ri à leur côté avec sincérité et sans artifice.

 

Alexandre SAINT-DIZIER

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